Le juge des référés rejette la demande de réouverture des salles de spectacle et de cinéma. Il reconnaît toutefois « une atteinte grave aux libertés » et prévient que « la mesure de fermeture n’est légale que tant que demeure un niveau particulièrement élevé de diffusion du virus ».
Noël ne sonnera pas avant l’heure pour le monde de la culture. Saisi par plusieurs dizaines d’artistes, théâtres et représentants du secteur du spectacle vivant et du cinéma pour qu’il suspende la fermeture des salles, le juge des référés du Conseil d’État a rejeté cette demande au vu du « contexte sanitaire général ».
Dans sa décision, rendue mercredi 23 décembre, il reconnait que cette fermeture « porte une atteinte grave aux libertés, notamment à la liberté d’expression, à la liberté de création artistique, à la liberté d’accès aux œuvres culturelles et à la liberté d’entreprendre ». Il souligne aussi la qualité des protocoles sanitaires mis en place par les différents lieux « qui sont de nature, au moins pour une partie des salles, à diminuer significativement le risque lié à l’existence de rassemblements dans un espace clos ».
Malgré tout, le contexte incertain des derniers jours pèse lourd dans la balance. « Les données actuelles montrent une dégradation de la situation sanitaire au cours de la période récente, à partir d’un plateau épidémique déjà très élevé, et pourraient se révéler encore plus préoccupantes au début du mois de janvier, précise le juge des référés. En outre, la détection d’un nouveau variant du SARS-CoV-2 au Royaume-Uni est de nature à accroître l’incertitude. » Ce qui pousse le magistrat à ne pas suspendre la fermeture.
« On a perdu, mais on a gagné »
Toutefois, le Conseil d’Etat prévient : « Le maintien de la fermeture au public serait manifestement illégal s’il n’était justifié que parce qu’il existe un risque de contamination des spectateurs, indépendamment du contexte sanitaire général. La mesure de fermeture n’est donc légale que tant que demeure un niveau particulièrement élevé de diffusion du virus, susceptible de compromettre à court terme la prise en charge, notamment hospitalière, des personnes contaminées et des patients atteints d’autres affections. »
Une décision que la directrice de Monfort, Laurence de Magalhaes, estime « juste, recevable et pas critiquable ». « On a perdu, mais on a gagné, se félicite-t-elle. Lorsque nous avons vu que le R0 était repassé au-dessus de 1, sans compter l’apparition du virus mutant en Grande-Bretagne, nous y allions sans illusions et savions que le moment était plus à la sagesse, mais nous avons été bien écoutés par le Conseil d’Etat qui réaffirme ce principe fort de liberté d’accès aux oeuvres culturelles. » Et le président du Syndeac, Nicolas Dubourg, d’abonder : « Par les arguments qu’il avance, le Conseil d’Etat reconnaît que les décisions prises par le gouvernement portaient atteinte à certaines libertés fondamentales. Si on enlève la question du timing, de la dégradation récente de la situation sanitaire dont nous avons bien conscience, cela revient à dire qu’il ne disposait pas d’éléments suffisants, le 10 décembre dernier, pour maintenir la fermeture de nos lieux et que celle-ci ne peut pas être durable. »
Désormais, le monde du théâtre espère que le gouvernement prendra le chemin de la concertation pour fixer des repères clairs et sera « plus équilibré dans ses décisions », selon le directeur du Théâtre Paris-Villette, Adrien de Van. « A l’avenir, avec une dynamique épidémique descendante, il ne sera plus possible d’ouvrir les commerces en laissant fermer les théâtres », anticipe-t-il. D’autant que le Conseil d’Etat a balayé d’un revers de main l’un des arguments des pouvoirs publics en affirmant que l’accès dématérialisé aux oeuvres ne pouvait se substituer totalement, en matière de liberté, au spectacle vivant.
Vincent Bouquet – www.sceneweb.fr
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