Tombée à 10 jours de la 2ème édition de la Nuit du Cirque, l’annonce du reconfinement empêche la tenue de cet événement auquel devaient participer plus de 100 lieux en France et en Europe. Aux dates prévues, du 13 au 15 novembre 2020, une Nuit numérique permettra toutefois à des artistes de montrer leur travail, en direct et en différé.
Pour sa deuxième édition, La Nuit du Cirque devait franchir deux caps majeurs. D’une journée, elle devait passer à trois. Elle devait aussi rassembler davantage de lieux, une centaine, en France ainsi que dans d’autres pays d’Europe. Cet événement dédié aux arts de la piste, qui vise à « montrer l’immense diversité de cet art aujourd’hui au zénith de sa jeune histoire », devra comme beaucoup d’autres attendre des temps plus propices pour poursuivre sur la belle lancée. L’association Territoires de Cirque, qui le porte avec le soutien du Ministère de la Culture, n’a toutefois pas voulu faire entièrement le deuil de tout ce qu’elle avait imaginé avec ses nombreux partenaires. Afin d’affirmer son soutien aux artistes déjà très fragilisés par le premier confinement, et leur permettre de rencontrer un public, a été décidée dès l’annonce du reconfinement le 28 octobre la tenue d’une Nuit numérique du Cirque. De la toile de chapiteau, la Nuit passe à la toile du net.
« Nous ne sommes pas des amuseurs publics »
Chapeautée par Régis Huvelin, chargé de développement du PALC – Pôle Cirque Grand Est et par Richard Fournier à la tête du Mans fait son cirque – pôle cirque en préfiguration –, cette édition 2.0 se présente sous plusieurs formes : trois émissions de deux heures diffusées en direct chaque jour à 21h, un contenu éditorialisé en libre accès sur le site lanuitducirque.com, ainsi que des vidéos en live sur les réseaux sociaux de plusieurs lieux. La priorité va à ce dernier format. « Il est important en cette période de montrer que des artistes travaillent en ce moment dans nos lieux, et qu’ils déploient des esthétiques fortes et très diverses. Comme il existe une littérature-monde, il existe un cirque-monde qu’il faut continuer de défendre », exprime Philippe Le Gall, directeur de Territoires de Cirque et du Carré Magique à Lannion en Bretagne, l’un des 13 Pôles Nationaux Cirque (PNC) du territoire. Cela d’autant plus que les derniers mois ont été particulièrement éprouvants pour le milieu du cirque.
« Après de longs mois d’arrêt, la reprise de l’entraînement, en juillet, a été difficile pour les circassiens. Les blessures ont été nombreuses. Les représentations ont doucement repris, et est arrivée une sanction incompréhensible : à Paris et dans quelques autres régions, a été décrétée l’interdiction des spectacles sous chapiteau, alors que les pièces en salle étaient autorisées ». La preuve, pour Philippe Le Gall, que « le cirque de création souffre toujours d’une forme d’incompréhension, voire de mépris en hauts lieux. Alors qu’avec un label et des écoles nationales, des compagnies conventionnées ou encore ses syndicats professionnels, nous formons un secteur très structuré, qui a très bien su s’adapter aux mesures sanitaires pour rouvrir ses lieux aux artistes en répétition et au public cet été. Nous ne sommes pas des amuseurs publics ». Tout comme le travail mené à l’année par l’ensemble de la profession, cette Nuit Numérique en sera la preuve.
Au cœur de la Nuit, le cirque en fabrique
Chacune des trois émissions de la Nuit sera construite et animée par un artiste différent : Gwen&Bambou de Cie la Général Posthume actuellement en résidence au PALC à Châlons-en-Champagne, Pauline Dau qui aurait dû présenter son ‘’one woman circus show’’ Vanité chez l’habitant à Saint-Herblain et Johan Swartvagher, jongleur associé à la Maison des Jonglages et au Pôle régional Cirque du Mans. En dialogue avec les équipes des lieux où ils se trouvent actuellement et celles de la Nuit du Cirque, ces trois présentateurs feront avec les moyens du bord. Par Zoom, ils jongleront entre des images filmées en direct par caméra ou par téléphone portable, capsules vidéo et autres surprises qui s’inventent au jour le jour.
Quant aux pôles cirque qui se prêtent à la transition numérique de leur Nuit, chacun a sa manière, à la Plateforme 2 Pôles Cirque en Normandie, on opte pour une présentation des deux équipes en résidence actuellement, à La Brèche à Cherbourg et au Cirque Théâtre d’Elbeuf : le prodige de la roue Cyr Juan Ignacio Tula et la voltigeuse Justine Berthillot ainsi que la compagnie Bestias. Interviews, extraits de répétitions et présentation d’une étape de travail nous permettront d’approcher le quotidien de ces artistes au travail. De même que les captations et retransmissions des spectacles des cinq compagnies programmées au Mans, à qui Richard Fournier a proposé de venir honorer malgré tout leurs rendez-vous. On s’aventure aussi du côté d’Archaos à Marseille et du PALC : facebook live et captations assurées.
Des capsules et des capsules
À La Cascade, PNC Ardèche Rhône Alpes, son directeur Alain Reynaud a commandé aux cinq compagnies en résidence ces jours-ci la réalisation de pastilles vidéo. Il les présentera lui-même le 13 novembre à 19h30 afin, dit-il, de donner à voir « la configuration de la Cascade, qui est comme une très grande maison. Son architecture et ses espaces permettent de répéter de la cour au grenier. On y trouve un grand Cirque entre des caravanes, un bâtiment ancien, un terrain de jeu, un théâtre, un cloître, des cuisines, des chambres, des bureaux… Tout un monde où s’écrit depuis 12 ans une histoire de cirques ».
Pour parfaire encore notre culture en matière de nouveau cirque, on va piocher dans les ressources que la Nuit du Cirque mettra en ligne sur son site. Un documentaire sur Johann Le Guillerm réalisé par la télévision argentine Canal Encuentro ravira par exemple les amoureux de travail de cet « artiste des points de vue », qui aurait dû être en résidence à Elbeuf pour la création de sa nouvelle création Terces. Il restera finalement à Calais, avec l’espoir d’y donner le jour à ce spectacle. Créées pour La Nuit du Cirque, dix capsules réalisées par Artcena nous mènent auprès de Jean-Baptiste André, Élodie Guezou ou encore Maroussia Diaz Verbèke, qui aurait dû reprendre pour la Nuit du Cirque son Circus Remix. Faute de quoi on pourra regarder le moyen-métrage Faire voltiger son monde de Sandrine Pujar, qui offre une belle approche du geste et de la parole de l’artiste. Les retrouvailles n’en seront que plus riches…
Anaïs Heluin – www.sceneweb.fr
La Nuit Numérique du Cirque
Du 13 au 15 novembre 2020 sur lanuitducirque.com, sur les réseaux sociaux des lieux partenaires.
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