La tribune parue cette semaine dans Libération et signée par une centaine de personnalités en soutien à Yorgos Loukos, le directeur du Ballet de l’Opéra de Lyon tout juste licencié, pose question.
En affirmant leur soutien à Yorgos Loukos directeur artistique du Ballet de l’Opéra de Lyon tout juste licencié, des personnalités du milieu artistique ont avant tout voulu saluer son talent et son engagement. La compagnie qu’il dirigea pendant presque 30 ans est reconnue dans le monde entier. Pour preuve la signature, au bas de cette tribune, de noms aussi prestigieux que William Forsythe, Lucinda Childs, Mats Ek ou Maguy Marin dont la compagnie a visiblement assuré le suivi et la collecte des noms.
Mais quelques heures après la parution dans Libération –ce mercredi 19 février- Forsythe faisait parvenir un communiqué sur un autre ton. Il n’est pas signataire déclare-t’il. Sa lettre, parfaite d’intelligence, a depuis été publiée sur le site libe.fr. « J’ai été sollicité pour signer, mais ai décliné, puisque la lettre porte sur des problématiques internes à l’Opéra dont je n’ai ni la connaissance, ni l’expérience, et parce que je suis en désaccord avec la démarche coercitive de vouloir retirer des œuvres du répertoire du ballet de l’Opéra de Lyon » dit-il.
Dans la foulée Benjamin Millepied, d’abord sur les réseaux sociaux puis dans un mail à notre attention, déclare également qu’il n’a pas signé cette tribune. Imbroglio sur toute la ligne. Il semble que le chorégraphe installé à Los Angeles a répondu positivement lorsqu’il lui a été demandé de soutenir Yorgos Loukos. Mais en découvrant le contenu de la tribune Millepied ne pouvait que se désolidariser. Il a confirmé au New York Times les faits.
Du côté des « organisateurs » il semble que l’accord initial de Benjamin Millepied suffisait… Visiblement d’autres personnalités ont émis des remarques sans que cela ne soit pris en compte. Didier Deschamps directeur de Chaillot précise en effet que la menace contenue dans la tribune –retirer des chorégraphies du répertoire du Ballet de l’Opéra de Lyon- n’est pas vraiment à son goût ; dans le communiqué que Jiri Kylian, autre signataire, nous a fait parvenir il est très clair sur ce sujet. « Je n’ai jamais dit que j’entendais retirer les ballets de la compagnie lyonnaise quel que soit le changement de situation ». Dans ce même courrier il ré-affirme son entier soutien à Yorgos Loukos*. C’est bien ce passage sur le retrait des chorégraphies en fin de tribune qui met dans l’embarras les chorégraphes de Forsythe à Kylian.
Certains observateurs précisent d’ailleurs qu’une telle mesure de rétorsion serait sans doute impossible. Les licences des ballets sont données pour 3 ans, difficile de les « casser ». Par contre un chorégraphe peut décider de ne pas la renouveler. Le Ballet de l’Opéra de Lyon bientôt en tournée aux Etats-Unis avec Les Trois Fugues dont celle de Maguy Marin n’a pas annoncé de changement de programme pour l’instant. Rachid Ouramdane ou Dimitris Papaioannou contactés par nos soins confirment avoir signé cette tribune. Mats Ek, toujours dans le NYT, aussi. L’idée pour les uns et les autres était de soutenir Yorgos Loukos dans l’épreuve –pas de revenir sur une décision de justice rendue. Mais la précipitation des organisateurs à qui Libération vient de demander des éclaircissements aura eu l’effet contraire.
Philippe Noisette – www.sceneweb.fr
* « I am upset with the way Yorgos Loukos is being treated which in my opinion shows a great lack of respect and integrity. I feel that Yorgos Loukos should be reinstalled as the artistic director of the Lyon Opera Ballet immediately so that he can finish his tenure as how he designed it to be » Jiri Kylian.
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