Johanna Silberstein et Matthieu Roy dirigent depuis janvier 2017 la Maison Maria Casarès à Alloue en Charente. Une bâtisse sur un terrain de 5 hectares que la comédienne achète en 1951. A sa mort en 1996, elle lègue son domaine à la commune d’Alloue. Plusieurs directions ont œuvré depuis 1999, plusieurs artistes dont François Marthouret et Claire Lasne-Darcueil ont veillé sur ce patrimoine. La Maison Maria Casarès est désormais ouverte toute l’année et reçoit des auteurs et des compagnies en résidence, et présente cet été un festival avec des créations (du 22 juillet au 22 août).
Rien n’a bougé ou presque depuis le décès de Maria Casarès le 22 novembre 1996. Le papier peint, ses meubles et ses livres sont toujours à la même place. À sa mort la comédienne lègue son domaine à la commune pour remercier la France d’avoir été une terre d’asile pour elle et sa famille qui ont fuit Franco. Véronique Charrier, ancienne directrice adjointe du festival d’Avignon, crée en 1999 l’Association « La maison du comédien Maria Casarès » présidée par le comédien François Marthouret. Elle modernise les « vergnes » en créant une salle de spectacle dans l’ancienne grange et des studios pour les compagnies en résidence. En 2017, La maison du comédien Maria Casarès change de nom et devient « La Maison Maria Casarès ». Johanna Silberstein et Matthieu Roy prennent la direction de la Maison qui a obtenu en 2008 le label de Centre culturel de rencontre. Elle est aujourd’hui membre de l’Association des Centres culturels de rencontre (ACCR), réseau européen. Elle devient aussi Maison des Illustres en 2011, label décerné par le Ministère de la Culture et de la Communication.
Le domaine se compose de quatre corps de bâtiment dont le logis de La Vergne ancienne maison de maître (inscrit à l’inventaire supplémentaire des Monuments Historiques) et une tour témoin de l’existence de fortifications. Le parc s’étend sur cinq hectares de jardins comprenant deux îles. Johanna Silberstein et Matthieu Roy, qui codirigent par ailleurs la Cie du Veilleur basée à Poitiers, ont imaginé une maison ouverte en permanence. Les activités du Domaine de la Vergne suivent le cours des saisons. Les artistes s’y croisent en permanence et rencontrent le public. « C’est pas parce que l’on vit en milieu rural isolé que l’on a pas le droit à la culture » dit en désherbant le jardin potager, Marie-France. Elle habite à Chabanais à quelques kilomètres d’Alloue et avec d’autres retraités, elle donne un peu de son temps pour la sauvegarde du domaine sous le regard de Jérémy le jardinier. « Il y a quelques années la maison passait pour un lieu élitiste où l’on présentait des spectacles pointus, la visibilité de la maison est bien meilleure désormais » martèle Marie-France, le dos courbé sur ses fraisiers.
Johanna Silberstein n’a jamais connu Maria Casarès, elle ne l’a jamais vu jouer sur scène mais elle est désormais la gardienne du temple et fait visiter toute l’année avec bonheur la bibliothèque rouge et noir aux couleurs de l’Espagne et les appartements privés de Maria Casarès. « On est parfois noyés dans des problématiques qui n’ont rien à voir avec notre métier d’artiste, mais tout le monde nous dit que le lieu est ressourçant, inspirant » explique la comédienne qui a enregistré avec Philippe Canales des extraits de la correspondance entre Maria Casarès et Albert Camus publiée chez Gallimard et qui sont diffusés tout l’été lors d’un parcours dans le domaine.
L’édition 2019 des étés de la Maison Maria Casarès propose une programmation articulée autour du patrimoine, du théâtre et de la gastronomie. Matthieu Roy présente trois spectacles dont deux créations (entre le 22 juillet le 22 août). En goûter-spectacle, Qui a peur du loup ? de Christophe Pellet (tous les lundis, mardis, jeudis et vendredis à 16h30) En apéro-spectacle, Gros de Sylvain Levey (tous les lundis, mardis, jeudis et vendredis à 18h30). Et en dîner-spectacle, Macbeth d’après William Shakespeare (tous les lundis, mardis, jeudis et vendredis à 19h30) avec la participation d’un septuor pré-enregistré avec les musiciens d’Ars Nova. Équipés de casques audio, les spectateurs suivront les aventures de Macbeth dans une grande proximité avec Juliette Allen soprano, Philippe Canales comédien, Iris Parizot alto, Léna Rondé soprano et Johanna Silberstein comédienne.
« On s’inscrit pleinement dans cette histoire de la décentralisation avec cette figure emblématique de Maria Casarès qui a parcouru la France avec Jean Vilar » explique Matthieu Roy. « On a envie de reprendre ces chemins et que les spectateurs reprennent le leur, sans pour autant leur dire qu’ici c’est un théâtre. On propose une expérience artistique patrimoniale et gustatives« . Le tout avec l’envie de faire du théâtre autrement dans cet écrin de verdure, une façon d’écrire une nouvelle page de la décentralisation théâtrale, en y incluant les problématiques environnementales. « Dans le monde de la culture on est souvent en avance d’un point de vue intellectuel sur beaucoup de sujets » poursuit Matthieu Roy. « Notre empreinte carbone est importante, on a envie d’être dans un rapport raisonné par rapport à la construction des décors et à leur recyclage« .
Tout au long de l’année des compagnies aguerries et des jeunes pousses sont en résidence dans les locaux annexes, pour imaginer le théâtre d’aujourd’hui, loin de tout, sans réseau téléphonique cellulaire, car on ne capte pratiquement aucun opérateur sur les 5 hectares du domaine. Ils présentent des étapes de leur travail au public dont Nadine, agricultrice qui vient depuis le début de l’aventure. « J’ai connu tout ce qui s’est passé depuis François Marthouret. J’ai la même émotion à chaque fois que je traverse l’allée. Je suis enracinée dans mon village, native de la commune. Je ne vais jamais en vacances, mon plaisir, c’est ici. J’ai le théâtre à deux kilomètres de chez moi.Il m’arrive de repartir et de ne pas comprendre, mais ce n’est pas grave« . Nadine est désormais bénévole pendant la période estivale parce qu’elle a trouvé des points commun entre le monde du théâtre et le monde agricole: « c’est le travail« .
Stéphane CAPRON – www.sceneweb.fr
Un festival avec seulement 4 propositions (les mêmes tous les jours) signées toutes par le directeur du lieu? y’aurait pas comme un léger abus de langage des fois ? décidément on appelle festival de nos jours n’importe quoi pourvu que ça se passe l’été. Sauf que ce n’est pas parce qu’il y a ‘estival » dans le mot que c’est son origine! 🙂 tout de même il aurait été sympa de faire créer d’autres gens que la compagnie même si elle invite d’autres le reste de l’année.
Cher Lefur
Pour répondre à votre questionnement, c’est justement parce que nous faisons les mêmes propositions de spectacles sur cinq semaines que ce festival est économiquement possible. Nous défendons une saison estivale sur un temps long avec des jauges réduites qui permettent une autre qualité de rencontre. Nous avons une même équipe artistique à demeure qui joue dans l’ensemble des propositions. Sur votre autre questionnement, concernant le partage de l’outil, ce lieu n’est pas encore assez pourvu économiquement pour avoir un autre modèle d’organisation lors de ce festival et donc inviter d’autres compagnies. Mais nous sommes en réflexion sur cet aspect de développement de la saison estivale dans les années à venir. Sachez que le festival d’Avignon du temps de Maria Casarès ne présentait que trois spectacles dont d’ailleurs Macbeth….
Vous avez entièrement raison. C’est une hérésie économique que de ne pas jouer les spectacles longtemps. Comme vous le dites puisque la référence est Vilar, les spectacles étaient joués durant tout le festival d’ Avignon et étaient peu nombreux de telle sorte qu’un maximum de monde pouvait assister à une ou l’autre représentation. Aujourd’hui c’est un même « petit public » qui assiste à de nombreux spectacles. En particulier dans les Scènes nationales. À terme ce sera la ruine du modèle. Donc le titre est juste. L’invention au 21eme siècle ce sera le « spectacle durable » !
Bonjour,
J’ai été recruté il y a 10 ans par l’Assemblée Régionale de Rodrigues, île autonome dans la République de Maurice (océan indien). Je suis Conseiller aux affaires culturelles et de loisirs pour l’ile. Je dois créer deux spectacles par an avec les artistes (peintres, décorateurs, musiciens, chanteurs, slameurs, comédiens, membres d’associations, population, écoles et collèges) et soutenir les créations des jeunes compagnies rodriguaises. Vous pourrez prochainement voir des montages vidéos de ces spectacles sur youtube, l’un d’eux (2017) y est déjà, réalisé par un vidéaste réunionnais, si vous voulez, je vous donnerai le lien.
Je serai de retour en France en juin 2022, d’ici là j’aimerais correspondre avec vous et vous rencontrer lors de mon retour. Je viens d’apprendre qu’Aurélie fera prochainement partie de votre Compagnie. Elle était responsable de l’alliance française locale (en 2005/2006) et pourra vous parler d’un spectacle populaire que j’avais monté avec les habitants de Rodrigues “Histoire d’une Cathédrale”(je peux vous envoyer le texte qui a été publié en 2016 ).
Pourriez-vous me tenir informé de vos activités ? Je reprendrai contact en temps voulu.
Bonjour à Aurélie de ma part et celle de mon fils Florian.
Bon travail, bien cordialement,
Jean-Pierre Soussigne