Avec Le Champ des possibles, la comédienne conclut son triptyque qui balise le long chemin de l’enfance à l’âge adulte. Un seule en scène à l’énergie débordante, drôle et sensible à la fois.
Pour dresser son portrait autofictionnel, Elise Noiraud a choisi d’en passer par la bande. A la jeune femme, tout juste sortie de son village poitou-charentais après l’obtention de son baccalauréat, elle ne confie la parole qu’a minima. Elle préfère donner corps et voix à son entourage, à tout ceux qu’elle a croisés sur la route escarpée qui l’a conduite des Deux-Sèvres à Paris. Conseillère d’orientation-psychologue léthargique, agent immobilier véreux, secrétaire grognarde de l’Université Paris-III, chargé de TD passionné par Simone de Beauvoir, responsable d’une association humanitaire à l’enthousiasme estudiantin, animateur de centre aéré cruel, médecin débonnaire, mère de famille débordée par son fils Agamemnon… La comédienne les croque et les incarne tous, avec un regard acéré qui prouve sa finesse d’observation.
Après La Banane américaine, consacré à l’enfance, et Pour que tu m’aimes encore, dédié à l’adolescence, Elise Noiraud poursuit son chemin vers l’âge adulte et décortique cette étape, aussi cruciale que délicate, où un enfant doit quitter ses parents, déserter le nid familial pour s’aventurer dans le champ des possibles et se frotter au vertige causé, parfois, par cette émancipation forcée. Parmi tous les personnages qu’elle convie, l’une attire plus l’attention que les autres : sa mère. A l’image de nombreux parents, elle supporte mal le départ de sa fille. Dépressive, triste dans sa vie trop bien rangée, elle déverse sur Elise son mal-être, pique des crises lorsqu’elle ne rentre que le samedi matin au lieu du vendredi soir et met tout en oeuvre pour qu’elle annule son stage prévu durant les vacances de Noël.
D’abord résolument comique, Le Champ des possibles se teinte peu à peu d’une sensibilité qui lui donne la force de l’universel. Dans un dispositif scénique particulièrement léger, avec quelques rares accessoires et les lumières de François Duguest comme seuls objets d’apparat, Elise Noiraud fait montre d’une énergie débordante. Au gré de transitions soignées, elle cherche la truculence dans les situations du quotidien, et navigue constamment entre la soif de liberté propre à une jeune femme de 19 ans, la peur de l’inconnu et la culpabilité que sa mère fait peser sur ses épaules. Tout en nuances, elle ne sombre jamais dans les clichés, mais préfère s’attacher aux micro-détails qui nimbent ses personnages d’une douce ironie et suscitent un attachement plus ou moins tendre. Dans cette collection de figures hautes-en-couleur, chacun pourra retrouver des personnalités, des traits de caractère et des émotions qu’il a lui-même rencontrés. Et se souvenir, alors, de son propre champ des possibles.
Vincent Bouquet – www.sceneweb.fr
Le Champ des possibles
(Elise : Chapitre 3)
Ecrit et interprété par Elise Noiraud
Collaboration artistique Baptiste Ribrault
Création lumière François DuguestSoutiens Studio-Théâtre de Stains (93) / Sud-Est Théâtre de Villeneuve-Saint-Georges (94) / Grange Dîmière de Fresnes (94) / La Manekine – Scène intermédiaire régionale de L’Oise (60) / compagnie Etincelles (Aubervilliers – 93)
Durée : 1h25
La Lanterne, Rambouillet
le 10 novembre 2022Sud-Est Théâtre, Villeneuve-Saint-Georges, dans le cadre des Théâtrales Charles Dullin
le 18 novembreEspace 89, Villeneuve-le-Garenne
le 20 novembreLe Moulin du Roc, Scène nationale de Niort
du 22 au 25 novembreSalle Jacques Tati, Saint Germain en Laye
le 30 novembreCentre Culturel Nelson Mandela, Pantin
les 1er et 2 février 2023Le Sillon, Petit Couronne
le 10 marsLe Pivo, Eaubonne
les 17 et 18 marsLe Quai 3, Le Pecq
le 24 marsThéâtre Impérial de Compiègne
du 30 mars au 2 avrilChangé
le 13 avrilEspace Armorica, Plougerneau
le 15 avril
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