Petite forme du Festival d’Avignon le solo de Jan Martens et le duo Ben & Luc se répondent dans le cocon des Hivernales.
Nouvel enfant prodigue de la danse belge Jan Martens a explosé sur les scènes européennes avec deux spectacles: le furieux The Dog Days Are Over et Rules of Three. Ode to the Attempt, invité à Avignon, vient rappeler le bon danseur qu’est Martens. Pas aussi doué qu’Anne Teresa De Keersmaker bien sûr mais sans doute plus cool. Dans cet auto-portrait non dénué d’humour Jan montre tout … ce qu’il n’est pas ; un danseur classique ou un virtuose contemporain. Tout le reste est à dévorer en 13 étapes, 30 minutes de jeu. Soit un zest de minimalisme comme un hommage irrévérencieux mais sincère aux grandes sœurs que sont Anne Teresa ou Lucinda, un doigt d’honneur à son ex-boy friend, une mise à nu au propre comme au figuré. L’ordinateur est son compagnon de jeu de tous les instants –selfie compris. Se dessine alors un instantané d’une vie d’interprète avec ses doutes, ses joies, ses grands moments de solitude. Il y a même cet instant de « partage » -c’est écrit sur l’écran- ou Jan Martens demande au public, accent flamand compris, si « Ca va ?». Et puis en creux et c’est le plus beau de ce solo il y a le corps qui change c’est à dire qui vous lâche. Ou vous lâchera. Jan Martens lui est déjà ailleurs.
Cette représentation partagée avec le duo de Mickaël Phelippeau semble d’abord une incongruité. Puis on comprend que Ben & Luc, la pièce, a également à voir avec le temps. Ben c’est Ben Salaah Cisse. Luc c’est Luc Sanou. Phelippeau a rencontré ces danseurs du Burkina Fasso en 2014. Ensemble ils échangent et vont donner un extrait de la chorégraphie à venir sur une place de Ouagadougou. Un pas de deux d’une extrême sensibilité. Mickaël Phelippeau dit qu’il n’avait pas conscience de l’incompréhension qui aurait pu naître de ce mano à mano masculin. Ben et Luc si. Ce qui va suivre, cette danse libre donc, est tout autant une « forme d’engagement » et un récit d’apprentissage. On verra Ben reprendre les mouvements d’une danse du peuple Peul apprise de sa mère, Luc évoquer la musique de son père. Les deux s’imaginer un futur avec 8 ou 9 enfants. On rit doux-amer. La qualité gestuelle n’est jamais prise en défaut. Il manque juste à Ben & Luc une tension dramatique plus appuyée. Comme si Mickaël Phelippeau troublé par leur complicité n’avait pas osé les bousculer. Avignon cet été à un peu le regard profond de Jan, Ben et Luc.
Philippe Noisettte – www.sceneweb.fr
Ode to the Attempt de et avec Jan Martens
Ben & Luc chorégraphie Mickaël Phelippeau avec Ben Salaah Cisse. Et Luc Sanou. Les Hivernales Avignon jusqu’au 24 juillet.
Ode to the Attempt sera également donné au Monfort/Festival Paris l’Eté les 31 juillet et 1 août.
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