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Didon, éternelle exilée

À la une, A voir, Aix en provence, Les critiques, Opéra

Au festival d’Aix-en-Provence, Vincent Huguet offre un prologue inédit et une approche à la fois personnelle et universelle du Didon et Enée de Purcell dans une mise en scène classique mais de toute beauté aux couleurs de l’exil et de la Méditerranée.

Sublimée par Sasha Waltz ou Deborah Warner dans des styles très différents, Didon et Enée est certes un opéra court, parvenu tardivement et de manière incomplète – les conditions de sa composition sont encore mal connues – mais riche d’une musique somptueuse, parfaitement émotive, et d’une intensité dramatique favorisée par la condensation de son écriture et la variété de ses inspirations. Tirée de Virgile, l’œuvre suscite des lectures diverses. Celle de Vincent Huguet propose un nouvel angle qui voudrait moins montrer la puissance de Didon, symbole de prospérité haïe, que s’intéresser au parcours singulier du personnage. Exilée, réfugiée, ayant fuit la Phénicie en proie à la guerre et à la violence, ballottée en mer, errante de Tyr à Carthage en passant par Chypre avant d’ériger Carthage.

C’est la raison pour laquelle le metteur en scène a fait appel à Maylis de Kerangal. La romancière, sensible à la question de la migration traitée dans son livre A ce stade de la nuit, a produit un travail, qu’elle définit comme « une mise en orbite de l’opéra », et plonge dans le passé du personnage. Son texte est incarné par Rokia Traoré digne et superlative dans la plus grande des simplicités. La comédienne et chanteuse malienne prête sa voix chaude et douce, emplie de mystère et de solennité, aussi bien à Didon qu’aux femmes jadis capturées et livrées aux hommes pour perpétuer Carthage. Sous le ciel sombre d’une nuit partiellement étoilée, elles s’avancent en cortège, se regroupent pour ce qui s’apparente à une veillée clandestine, emmitouflées dans des couvertures, postées à même le sol. Une voix s’élève mais à travers elle, ce sont toutes les femmes qui parlent devant le mur massif en pierres claires et lézardées représentant la Cité nouvellement fondée. Plus tard, une Didon majestueuse surplombe sur cette muraille puis mourra à ses pieds.

L’écho à l’actualité cruelle et brûlante des migrants se fait immédiatement entendre. Vincent Huguet aurait pu, peut-être même dû, mettre en scène plus explicitement cette résonance à la dure réalité contemporaine. Ancien collaborateur artistique de Patrice Chéreau jusqu’à sa dernière époustouflante Elektra créée au festival d’Aix, il n’adopte, comme son Maître, le geste de l’actualisation forcenée. En faisant fi de la temporalité, il créé plutôt un pont entre l’antique et l’aujourd’hui pour livrer un tableau élégant mais presque trop esthétisé et prive le public d’une imagerie plus référencée et saisissante.

Malgré une technique imparfaite et une approximative justesse, Kelebogile Pearl Besong impose une Didon atypique d’une belle présence, à la fois forte et fragile, et fait une subtile lamentation (La direction du Festival d’Aix a fait savoir par un communiqué du 9 juillet que « pour raisons de santé », Kelebogile Pearl Besong devait renoncer au rôle de Didon. C’est désormais la mezzo française Anaïk Morel qui interprétera la reine de Carthage jusqu’à la fin du festival). La soprano sud-africaine, à la fois altière et tourmentée forme avec le baryton Tobias Lee Greenhalgh un couple lumineux dont l’amour éphémère est menacé par les sorcières, ici le peuple insoumis mené avec maestria par Lucile Richardot. Il manque dans leur jeu un brin de cette délicieuse sensualité omniprésente dans la musique mais l’excellent Ensemble Pygmalion dirigé en fosse par Vaclav Luks prend en charge cette suavité languissante et plaintive dans une restitution extrêmement précise et aimante de la partition riche en contrastes et en raffinement. Une vive émotion étreint lorsque les Chœurs magnifiques de délicatesse pleurent à l’unisson la mort de leur reine délaissée dans le silence de la nuit aixoise.

Christophe Candoni – www.sceneweb.fr

HENRY PURCELL
Didon et Énée
Livret de Nahum Tate
Texte du prologue de Maylis de Kerangal
Direction musicale Václav Luks
Mise en scène Vincent Huguet
Décors Aurélie Maestre
Costumes Caroline de Vivaise
Lumières Bertrand Couderc
Didon Kelebogile Pearl Besong
Une femme de Chypre Rokia Traoré
Énée Tobias Greenhalgh
Belinda Sophia Burgos
L’Enchanteresse Lucile Richardot
Deuxième suivante Rachel Redmond
Première sorcière Fleur Barron
Deuxième sorcière Majdouline Zerari
Marin Peter Kirk
Chœur et Orchestre Ensemble Pygmalion
Nouvelle production du Festival d’Aix et de l’Académie
Coproduction : Théâtre Bolchoï, Moscou

THÉÂTRE DE L’ARCHEVÊCHÉ
7, 10, 12, 13, 17, 18, 20, 23 juillet 2018 | 22h
Le spectacle sera également présenté ultérieurement au Théâtre Bolchoï de Moscou.

8 juillet 2018/par Christophe Candoni
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