Le chorégraphe et danseur François Chaignaud présentera cet été dans la 72ème édition du Festival d’Avignon, Romances inciertos, un spectacle créé en septembre 2017 au Théâtre Saint-Gervais Genève dans le cadre de La Bâtie-Festival de Genève, dans une mise en scène de Nino Laisné.
Romances inciertos est un estuaire, un delta. Une zone difficilement situable sur les cartes, à la confluence de musiques espagnoles de tradition à la fois orale et “savante”, qui inspirent des danses, des poèmes et de mini épopées dont les héroïnes jouent des rôles qui ne sont pas les leurs. L’histoire de ces personnages, pris dans un mouvement perpétuel de métamorphose, d’ambiguïté, d’imposture entêtée, et d’indécision embrasée se reflète dans le destin même des mélodies qui leur sont attribuées. Romances Inciertos met en scène ces deux trajectoires : la renaissance des personnages qui n’ont d’autre choix que de transformer le réel à la mesure de leur désir – et l’infinie mutation de motifs musicaux à travers les siècles. L’identité incertaine de ces figures se réfléchit dans le métissage musical.
La plupart de ces mélodies sont apparues aux XVIème et XVIIème siècles en Espagne et depuis, n’ont jamais cessé d’être interprétées, modifiées, transformées. Chaque culture mais aussi chaque époque se sont réappropriées ces poèmes, actualisant sans cesse les aventures de leurs héroïnes. C’est ainsi que ces mélodies – issues de l’art du romance, du chant sépharade ou de la jota se sont introduites dans la musique baroque, le flamenco andalou ou encore les cabarets travestis de la Movida. Les coplas – les vers – eux-mêmes se sont démultipliés, et à l’ombre des versions les plus connues, les archives gardent la trace de strophes paillardes, retraçant le destin marginal de ces figures.
Les quatre solistes rejouent ici ces trajectoires, en empruntant des mélodies originairement écrites pour d’autres instrumentarium, en osant le rapprochement de timbres réputés incompatibles : le bandonéon se rêve clavecin, la viole de gambe bourdonne des zambras douloureuses, les percussions s’invitent dans la musique sacrée, et les réminiscences baroques des marches sévillanes apparaissent au creux du théorbe.
La scène, cerclée de tapisseries dont la trame rassemble de multiples représentations historiques de la nature, ouvre un paysage autour des cinq interprètes. La danse surgit, recoud et trouble : à la fois sœur et émule de la musique, elle s’impose comme art de l’impur et met le corps à l’épreuve du présent. Simultanément factice et réel, il tente d’atteindre d’impossibles altitudes dans un équilibre affranchi de la gravité. Les gestes s’engouffrent dans l’écart laissé entre les danses “traditionnelles” et leurs avatars académiques – suivant la trace de ces mutations chorégraphiques, dont l’histoire oscille entre pillages et inspirations.
C’est donc un delta impur, irisé, sur lequel semble scintiller la silhouette inattendue de l’Orlando de Virginia Woolf. Mais cet Orlando-là n’est plus un jeune lord de la Cour royale d’Angleterre qui vit quatre siècles et sombre régulièrement dans un profond sommeil. Il se consacre tout au long de sa vie à l’écriture d’un seul et même poème qui se teinte des reflets des époques qu’il traverse et se fait l’écho des mutations infinies des arts et des sociétés. Comme dans le roman, nous sommes ici en présence d’un personnage à éclipses, qui soudain s’absente pour renaître sous les traits d’une femme, ailleurs, dans l’espace et dans le temps.
Par l’épreuve du chant et de la danse, cet autre Orlando, porté par les musiciens, se lance dans une forme d’épopée dont les métamorphoses incessantes n’assouvissent jamais la quête d’un idéal.
Romances inciertos
Conception, mise en scène et direction musicale : Nino Laisné
Conception et chorégraphie : François Chaignaud
Interprétation
Chant et danse : François Chaignaud
Théorbe et guitare baroque : Daniel Zapico / Pablo Zapico
Bandonéon : Jean-Baptiste Henry
Violes de gambe : François Joubert-Caillet / Robin Pharo / Thomas Baeté
Percussions historiques et traditionnelles : Pere Olivé
Création lumière et régie générale : Anthony Merlaud
Régisseur son : Charles-Alexandre Englebert
Décor :
chef peintre Marie Maresca
peintre : Fanny Gaudreau
retouches image : Remy Moulin, Marie B. Schneider
construction : Christophe Charamond, Emanuel Coelho
Création costumes : Carmen Anaya, Kevin Auger, Séverine Besson, María Ángel Buesa Pueyo, Caroline Dumoutiers, Pedro García, Carmen Granell, Manuel Guzmán, Isabel López, María Martinez, Tania Morillo Fernández, Helena Petit, Elena Santiago
Administration — Production : Barbara Coffy, Jeanne Lefèvre, Céline Peychet, Clémentine Rougier
Diffusion : Sarah De Ganck – Art HappensProduction déléguée : Vlovajob Pru & Chambre 415
Vlovajob Pru est subventionnée par le Ministère de la Culture et de la Communication (DRAC Auvergne-Rhône-Alpes) et le Conseil Régional d’Auvergne-Rhône-Alpes. Vlovajob Pru reçoit l’aide de l’Institut français pour ses projets à l’étranger.
François Chaignaud est artiste associé à Bonlieu Scène nationale Annecy.
Nino Laisné est membre de l’Académie de France à Madrid – Casa de Velázquez.Coproduction
Bonlieu Scène nationale Annecy et La Bâtie-Festival de Genève dans le cadre du programme INTERREG France-Suisse 2014-2020, Chaillot – Théâtre National de la Danse – Paris, deSingel – Anvers, la Maison de la musique de Nanterre, L’Arsenal – MetzSoutiens
Ce projet a reçu le soutien de la Région Auvergne-Rhône-Alpes, la Spedidam, PACT Zollverein Essen, Tandem Scène nationale Arras-Douai, Ayuntamiento de Anguiano – La Rioja, les Pépinières Européennes pour Jeunes Artistes et l’Ayuntamiento de Huesca dans le cadre de la résidence Park in Progress 12, et a bénéficié d’un accueil studio aux Teatros del canal – Madrid, au Centre National de la Danse – Pantin, la Ménagerie de verre – Paris (Studiolab) et El Garaje – Cadíz.
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