Ce devait être la grande fête annuelle d’une entreprise de construction automobile : la remise des médailles du travail aux plus vieux salariés. Mais la fête va tourner au vinaigre, chahutée par des ouvriers qui se rebellent dans leurs ateliers. La pièce de Zabou Breitman est dans l’actualité. Destruction de l’industrie française, délocalisations, pénibilité au travail, retraites…autant de thèmes qui résonnent dans cette rentrée sociale. Ce pouvait être une ode magnifique au monde ouvrier, ce n’est malheureusement qu’un hommage peu appuyé à celles et ceux qui ont façonné la France depuis l’ère de l’industrialisation. Zabou Breitman a adapté le roman de Lydie Salvayre. Un texte écrit en 1993, l’année de la première réforme des retraites, les lois « Fillon ». Un texte qui manque de profondeur, et qui ne fait pas suffisamment ressortir l’âme de ces ouvrières et ces ouvriers qui ont débuté dès leur plus jeune âge sur des chaînes de montage.
« La Médaille » tourne en dérision le monde de l’entreprise. Il est vrai que les cadres sont caricaturaux. Il y a le directeur des sciences sociales (Eric Prat) qui vient expliquer la typologie du monde ouvrier, avec ces ouvriers noirs qu’il conviendrait de renvoyer chez eux par charter (!). La directrice de l’action sociale (Caroline Gonce) vient expliquer les nouveaux dispositifs mis en place pour mieux vivre l’entreprise comme ce nouveau restaurant où tout le monde paiera le même prix. Et puis les trois récipiendaires (Maryline Even, Jean-Claude Frissung, Geneviève Mnich – trois comédiens de talent) racontent tour à tour maladroitement au micro leurs années d’entreprise, leur pénibilité au travail et finalement leur amour de l’entreprise. Mais ce n’est pas suffisant. Il manque de l’émotion.
Au moment où Pôle emploi a annoncé cet été que 256100 emplois ont été détruits en 2009 en France, la pire baisse de l’emploi salarié depuis 1945, Zabou Breitman avait l’occasion avec la sensibilité qu’on lui connaît de réaliser un spectacle émouvant sur ces français en voie de disparition. D’autant que dans les chiffres de Pôle emploi le secteur industriel, dans lequel travaillent 19% des salariés français, a été le plus touché avec une baisse des emplois de 5,2%. Mais en s’attachant à ce texte de Luydie Salvayre, elle ne parvient pas à nous émouvoir. Cela manque cruellement de vécu. On a alors envie de revoir « Daewoo » de François Bon qui racontait le sort des ouvriers de l’usine de Moselle avec une grande justesse et des témoignages poignants.
Stéphane CAPRON – www.sceneweb.fr
La Médaille
un spectacle de Zabou Breitmann
texte de Lydie Salvayre
publié par les éditions du Seuil et par les éditions Points
avec Jean-Luc Couchard Jean-Luc Lehérissé, Directeur des ressources humaines
Maryline Even Mme Veuve Duchêne (médaille de vermeil)
Jean-Claude Frissung Auguste Donte (médaille d’or)
Caroline Gonce Caroline Bisson, Directrice de l’Action sociale et de la communication
François Levantal François Fabre, Directeur de la sécurité
Geneviève Mnich Geneviève Pizzuto (médaille d’or)
Eric Prat Eric Monsaingeon, Directeur en sciences sociales
Delphine Théodore Delphine Bourseguin, secrétaire
assistante à la mise en scène Marjolaine Aizpiri
lumières David Perez
son Patrick Ciocca
production Théâtre Vidy-Lausanne, coréalisation Théâtre du Rond-Point avec le soutien du Théâtre Nanterre-Amandiers
Durée : 1h20
du 9 septembre au 9 octobre à 21h au Rond-Point – Paris
du 13 au 23 octobre Lyon
le 9 novembre Corbeil
le 13 novembre Martigues
les 16 et 17 novembre Fribourg
le 20 novembre Saint-Raphaël
les 23 et 24 novembre Angoulême
les 26 et 27 novembre Vélizy
le 30 novembre Neuchâtel
le 2 décembre Vesoul
le 7 décembre Saint Etienne Rouvray
le 10 décembre Colombes
le 14 décembre Les Sables d’Ollones
les 17 et 18 décembre Grasse
Je suis absolument d’accord avec Stéphane Capron. Ce spectacle est une déception totale. Quel ennui ! De longs monologues dépassés qui se succèdent sans fin ou presque. Qu’est-ce que Zabou Breitman a bien pu trouver d’intéressant dans cette pièce ? Et puis la mise en scène de la fin n’est pas sans rappeler celle de Deschamps mais sans le souffle, ni la grâce. Déçue !
Texte grossièrement caricatural. Zabou Breitman nous avait enthousiasmé avec son adaptation des « Gens » de Depardon. Quelle déception ici.