C’est parti pour la 71ème édition du Festival d’Avignon., la 4ème sous la direction d’Olivier Py qui achève son premier mandat. Le public va découvrir de nouveaux artistes qui n’ont jamais été programmés, avec une large proportion de spectacle étrangers. Durant cette édition, Olivier va mettre en scène Les Parisiens à la Fabrica – adaptation de son roman paru chez Actes-Sud en septembre 2017, et Hamlet avec des détenus du Centre Pénitentiaire du Pontet. Présentation de cette édition avec son directeur.
Comment aimeriez-vous qu’elle soit cette 71ème édition ?
J’aimerai qu’elle soit populaire, que toute la société s’y retrouve, qu’elle soit pleine d’espoir car je trouve que l’on vient de passer quelques années sombres et déprimantes en France. Quand les artistes parlent du monde de manière chaotique, ils donnent toujours des raisons d’espérer.
Beaucoup d’artistes n’ont jamais été programmés au Festival. C’est une volonté de faire découvrir de la nouveauté aux festivaliers ?
J’y tiens depuis le début de mon premier mandat. Le public est de mon côté, cela ressort dans les études, il souhaite découvrir des talents. Pour les artistes français, c’est de l’émergence ; pour les artistes internationaux, on va les chercher avec Agnès Troly – directrice de la programmation – à l’autre bout de la planète. Cela fait 26 ans que l’on travaille ensemble. On se partage le globe. Quand elle est en Afrique, je suis dans un autre hémisphère. On pourrait chaque année faire deux Festivals d’Avignon, mais il n’y a de la place que pour 50 spectacles.
Ces artistes nouveaux, ce sont aussi ceux du focus sur l’Afrique Subsaharienne.
C’est une nouvelle voix de l’Afrique que l’on veut faire entendre avec des artistes qui travaillent souvent de manière in disciplinaire à partir d’interviews, de textes, de poèmes, de chorégraphie, de musique. Il ne s’agit pas de texte « classique écrit » au sens européen, mais leur parole est toujours politique.
Certaines voix en Afrique ont regretté justement que les dramaturges africains ne soient pas assez présents.
Les auteurs seront tout de même présents. Je crois aussi que les auteurs contemporains ne sont pas assez montés. Quand il y aura un choix plus important de productions en Afrique, on pourra en inviter plus.
Les femmes sont de plus en plus présentes, même si la parité n’est pas encore atteinte.
C’est dommage, mais on va y arriver un jour. Les femmes sont présentes à l’intérieur des spectacles. J’ai l’impression de voir se dessiner un nouveau féminisme. Ce sont des femmes engagées, solidaires de ceux qui souffrent. Quand c’est Elfriede Jelinek qui parle des migrants, c’est la parole d’une femme.
Vous avez écrit l’année dernière un roman, Les Parisiens. Saviez-vous qu’il allait devenir une pièce ?
C’était tout le contraire. Je voulais me lancer dans l’écriture romanesque pour m’éloigner sur le plan stylistique du théâtre. C’est un roman fleuve. Il était à mes yeux inadaptable, alors je l’ai fait !
Vous l’avez réécrit ?
Je l’ai simplement adapté en travaillant avec les comédiens. C’est comédie, une farce. Parfois ils ont sauvé des pages du roman.
C’est une comédie sur la vie parisienne, sur la politique, le milieu gay. C’est une comédie qui vous ressemble ?
C’est une comédie qui ressemble au monde que je fréquente. C’est le monde de la politique et de la culture. On voit des directeurs de théâtre, d’opéras, des ministres de la Culture et puis on voit aussi le monde qu’il y a en dessous comme la révolution des prostituées qui se met en place. C’est aussi le portrait d’une génération celle des acteurs qui sont jeunes dont le rapport au monde est différent du notre.
Il y a beaucoup de sexe dans le roman. Il y en aura sur scène ?
Il y a beaucoup de sexe. Quand j’avais 20 ans j’avais un rapport religieux au sexe, là il est plus drôle. C’est un élément majeur de cette comédie.
Dans votre travail il y a ce que l’on voit et ce que l’on ne voit pas, notamment votre travail ici à Avignon toute l’année et notamment en prison. Il y a aura d’ailleurs dans le Festival trois représentation de Hamlet avec des détenus à la Maison Jean Vilar. C’est une autre facette de votre métier de directeur ?
J’ai l’impression d’être dans ma mission. Un homme de théâtre est un artiste dans la cité, pas un artiste enfermé dans ses rêves. Il ne peut pas être autarcique. Un écrivain peut l’être, pas nous. J’ai choisi la scène pour organiser le dialogue avec la cité.
En assistant à une répétition d’Antigone et de Hamlet au Centre Pénitentiaire du Pontet, j’y ai vu avant tout des comédiens, plus que des détenus.
Je les considère comme des comédiens amateurs avec des niveaux très différents, et pas comme des détenus. Pendant les heures que je passe avec eux, je ne les juge que sur le jeu. La privation de liberté pour conduire à une perte de dignité. Je ne suis pas dans le caritatif en menant ce travail. Je suis avec eux dans la recherche artistique. Je suis attaché à cette aventure même si je la trouve difficile.
Cela vous change quand vous passez du temps avec eux ?
Oh oui mes petits problèmes du quotidien paraissent dérisoires face à ces vies traumatiques. La souffrance est là chez ces hommes.
Propos recueillis par Stéphane CAPRON – www.sceneweb.fr
Laisser un commentaire
Rejoindre la discussion?N’hésitez pas à contribuer !