Réunis le temps d’une soirée partagée au Théâtre des Abbesses, Jan Martens et Ayelen Parolin incarnent une relève au plat pays.
Il court il court Jan Martens : à tel point que l’on ne sait plus trop si les pièces affichées un peu partout en Europe sont des créations ou des reprises. Pas grave l’énergie de ce danseur et chorégraphe fait chaud au cœur. En une poignée de pièces comme Sweat Baby Sweat (découvert aux Rencontres de Seine Saint-Denis) ou son best-seller The Dogs Days are Over Martens a imposé une gestuelle incisive qui dialogue avec le conceptuel sauce flamande. Ode to the Attempt, solo, est alors comme une respiration pour ce jeune homme pressé : il se met en scène en toute simplicité, un créateur qui doute, se moque de lui même ( et un peu des autres). « Le passé est si dépassé » plaisante-t’il à peine. Face à son écran d’ordinateur il énonce alors 13 tentatives : de faire minimaliste, charmant, corrosif aussi en envoyant un message à son ex. Il ose tout mais surtout son contraire et au final se met à nu. On pourrait ne voir là qu’une récréation : c’est surtout une étude des temps modernes où le chorégraphe est quasi virtuel. Pour Jan Martens, Ode to the Attempt est sans doute une façon de toucher terre à nouveau, de se dégriser du succès. Il n’est pas anodin que ce dernier se soit blessé en le dansant il y a deux ans. Comme si le corps reprenait le dessus.
Argentine de Bruxelles Ayelen Parolin après des études à Buenos Aires va suivre la formation exerce de Montpellier puis danse pour Mathidle Monnier, Mossous-Bonte ou Alexandra Bachzetsis. Cet été elle sera de (presque) tous les festivals répondant à une commande du Ballet National de Marseille et du Festival de Marseille ou présentant Autochtonos à Montpellier Danse. En attendant voici Hérétiques à Paris ouvrant cette soirée. Duo accompagné de la formidable pianiste et compositrice Lea Petra ce travail place les danseurs en position de force : une chorégraphie répétitive, qui se veut hypnotique, où les bras seuls donnent la cadence. Soit 310 figures pour une grammaire du geste. On pense à un hommage masculin à Fase création emblématique d’Anne Teresa De Keersmaeker. Marc Iglesias et Gilles Fumba tout entiers à leur concentration en sont presque menaçants. Vont-ils sortir du cadre, s’effondrer ? Hérétiques se ménage un temps plus calme, lumières adoucies avant de repartir de plus belle. L’exercice de style en impose à défaut de nous transporter. Il lui manque cette sensation de vertige. Mais à l’évidence Ayelen Parolin a de la ressource.
Philippe Noisette – www.sceneweb.fr
Hérétiques chorégraphie Ayelen Parolin
Ode to the Attempt chorégraphie Jan Martens
Théâtre des Abbesses Paris jusqu’au 10 juin www.theatredelaville-paris.com
Laisser un commentaire
Rejoindre la discussion?N’hésitez pas à contribuer !