Nous qui sommes cent : voyage inattendu dans les méandres de l’âme
D’un thème sombre, Jonas Hassen Khemiri fait un texte à la fois drôle, tragique et touchant. Le collectif Les Intrépides, qui le monte sur la scène des Déchargeurs, nous rappelle qu’il n’est pas nécessaire d’avoir beaucoup de moyens pour faire un théâtre génial et essentiel.
« Nous qui sommes cent » raconte l’histoire d’une femme au bord du suicide, sauvée par sa multiplicité. Car, comme chacun d’entre nous, elle est en compagnie de ses autres « moi ». Sur scène, elles sont trois, habillées de façon semblable, partageant la même coiffure, la même vie, mais elles l’appréhendent toutes différemment. Si nous n’en voyons que trois, elles pourraient être cent.
Ce texte, du suédois Jonas Hassen Khemiri, est une image poétique, mais sans fard de la vie moderne qu’une femme « normale » peut vivre, jusqu’au désespoir le plus sombre. Elle se berce d’illusions et songe de pouvoir tout recommencer. De ses premiers pas, à sa première défonce, de son premier amour à son premier viol conjugal. Une soumission au monde qui laisse peu de place à la raison pour s’en sortir. Alors elle rêve et se parle, se dispute face à son « moi » idéaliste quand le « moi » de la sagesse ne prend pas le dessus. Si ces enchevêtrements semblent abstraits, cela est très bien composé et la mise en scène alterne pensées et exemples en soulignant aux justes moments le tragique et la légèreté.
Nous partageons un moment sombre et drôle avec ces trois « moi ». Les actrices sont formidables. Laura Perrotte, qui signe la mise en scène, est accompagnée de Caroline Monnier et Isabelle Seleskovitch. Par l’intelligence de leurs jeux, elles arrivent à faire ressortir toutes les contradictions et les fantasmes qui cohabitent dans une seule âme. Nous sommes captivés par ce que chacun de nous pourrait vivre : une situation aux issues multiples et pourtant hissée au sommet de son universalité.
Hadrien VOLLE – www.sceneweb.fr
Nous qui sommes cent de Jonas Hassen Khemiri par Les Intreprides
Mise en scène: Laura Perrotte
Avec Caroline Monnier, Laura Perrotte, Isabelle Seleskovitch
Traduit par Marianne Ségol-Samoy
Paru aux éditions ThéâtralesOff 2017
Nouveau Ring à 18h du 7 au 30 juillet
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