Valeria Bruni Tedeschi revient au théâtre, cinq ans après Rêve d’Automne monté en 2010 par Patrice Chéreau. Elle a choisi Fassbinder et les Larmes amères de Petra von Kant dans une version baroque signée Thierry de Peretti. Elle est émouvante de bout en bout.
Le théâtre de l’Œuvre est devenu l’appartement de Petra von Kant, créatrice de mode, la quarantaine qui succombe aux charmes de la jeune Karine. Petra va devenir prisonnière de cet amour, accro à Karine, comme elle est accro à l’alcool et aux cigarettes.
Dès les premières minutes Valeria Bruni Tedschi pose son personnage. Il règne sur le plateau une drôle d’atmosphère entre les cadavres de bouteilles, les tapis persans, une reproduction de la tapisserie « La dame à la Licorne » accrochée aux cintres, et la musique pop rock, on est transporté dans les années 70.
Thierry de Peretti aborde la pièce sur le mode baroque bourgeois décadent tout en conservant le côté trash de l’univers de Fassbinder. Lorsque Petra fait pipi, elle ne se rend pas aux toilettes mais elle urine sur une cuvette dans son séjour et donc devant les spectateurs. On n’arrête pas de souligner l’audace de Frédéric Franck, le directeur du théâtre de l’Œuvre, qui continue de prendre des risques. Ici certains spectateurs ne manqueront pas d’être choqués.
Thierry de Peretti tient son idée jusqu’au bout. Petra court partout dans son appartement et dans la salle. Il utilise les coulisses, le balcon et la salle. Dans cette pièce à l’atmosphère déjantée, la musique tient un rôle prépondérant. Elle est présente du début à la fin. Des Smiths aux Clash en passant par Mozart, Beethoven ou Aznavour. C’est la ritournelle enivrante du quotidien de Petra dont la vie bascule dans l’hystérie le jour de ses 40 ans. Valeria Bruni Tedeschi joue de manière totalement décomplexée, elle est fascinante de vérité dans l’excès. Lorsqu’au dernier acte Petra lance à sa mère « vieille pute usée« , on ne peut s’empêcher de sourire car c’est Marisa Borini, sa propre mère qui est en face d’elle.
L’esprit de Fassbinder est bien là, dans un univers esthétique assumé qui fonctionne totalement. Tous les personnages féminins de la pièce ne sont pas encore à la hauteur du jeu de Valeria Bruni Tedeschi. Gabrièle, sa fille (Sigrid Bouaziz) et Karine sa maîtresse (Zoé Schellenberg) sont encore un peu tendres. En revanche le rôle muet de la bonne Marlène incarné par Lolita Chammah est totalement réussi, elle met beaucoup de piment sur le plateau par sa jalousie qui crève les yeux.
Stéphane CAPRON – www.sceneweb.fr
Les Larmes amères de Petra von Kant
de Rainer Werner Fassbinder
Texte français de Mathieu Bertholet
Avec
Valeria Bruni Tedeschi ……………… Petra von Kant
Kate Moran …………………………….. Sidonie von Grasenabb
Zoé Schellenberg ……………………………… Karine Thimm
Sigrid Bouaziz ………………………………. Gabrièle von Kant
Pamela Knaack ……………………………………………… Marlène
(En cours de distribution) ………..Valérie von Kant
Mise en scène Thierry de Peretti
Assisté de Benjamin Charlery
Décor Rudy Sabounghi
Costumes Caroline de Vivaise
Lumières Jean-Luc Chamonat
Son Sylvain JacquesDurée: 1h40
CRÉATION AU THÉÂTRE DE L’OEUVRE
LE JEUDI 12 FÉVRIER 2015
(pour 60 représentations)
Représentations : 21h du mardi au samedi, 16h le dimanche
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