La crise financière et la crise de l’identité des nations sont au cœur de la création du brésilien Antônio Araújo très attendue à Avignon qui se déroule dans l’hôtel des Monnaies, un spectacle déambulatoire pour seulement soixante spectateurs.
Ce spectacle est présenté dans le cadre de Villes en Scènes/Cities on Stage, un programme européen lancé alors qu’Olivier Py dirigeait le Théâtre de l’Odéon. Une première version a été créée en mai au Théâtre National de Bruxelles. Le brésilien Antônio Araújo et son équipe ont totalement repensé la scénographie pour cette version avignonaise dans l’hôtel des monnais qui fait face au Palais des Papes de l’autre côté de la place. C’est un spectacle qui demande énormément de technologie, tout est piloté à l’aide de tablettes électroniques reliées entre elles par wi-fi.
La pièce écrite par le romancier brésilien Bernardo Carvalho, peu connu en Europe, raconte l’histoire d’un fonctionnaire de l’immigration (Nicolas Gonzales – seul comédien français de l’équipe) dont la vie bascule en raison de la crise économique. Il va perdre son emploi, c’est la déflation, et il doit faire face à ses créanciers qui lui réclament de l’argent alors que sa femme est enceinte. Lors d’un contrôle de passeport à l’aéroport, il croise une économiste (Claire Bodson) qui se rend à un congrès et son père muet qui va disparaître mystérieusement.
La déambulation débute dans la rue. Le fonctionnaire est juché sur une caravane avec sa femme, puis le public se regroupe dans une cour, un peu exiguë, avant de prendre place dans l’atrium de l’hôtel, par moment les portes s’ouvrent sur l’extérieur et l’on découvre le Palais des Papes. Tout le monde se regroupe à la fin au dernier étage pour assister au début de la conférence de l’économiste dont le thème est « crise financière et identité« .
Les spectacles déambulatoires ont souvent le défaut de noyer les spectateurs dans une narration évasive. Ici c’est tout le contraire car la pièce s’appuie sur un texte et une histoire dont on ne perd par le fil. Certains passages sont un peu téléphonés et convenus comme le discours sur la gauche archaïque ou l’état de la Grèce. Mais dans l’ensemble on a été happé par la construction de la pièce qui réveille les vieux démons européens qui l’on a vu poindre lors des élections européennes: la peur de l’étranger, le repli identitaire. « L’ennemi est là parmi nous à l’intérieur de nos frontières » dit au début de la pièce le fonctionnaire. Cette pièce révèle à quel point la crise économique traversée par l’Europe isole les individus, c’est une nouvelle pierre dans un festival 2014 qui se veut engagé et militant.
Stéphane CAPRON – www.sceneweb.fr
Dire ce qu’on ne pense pas dans des langues qu’on ne parle pas
Texte édité aux Solitaires Intempestifs
Texte : Bernardo Carvalho / Mise en scène : Antônio Araújo / Avec : Roberto Audio, Jean-Pierre Baudson, Claire Bodson, Didier de Neck, Vanja Godée, Nicolas Gonzales, Vincent Hennebicq, Luciana Schwinden / Choeur : Laetitia Augustin-Viguier, François Ebouele, Laetitia Evens, Fabien Magry, Nabil Missoumi, Kathia Bissoli et Daniel Farias / Scénographie : Thiago Bortolozzo / Dramaturgie : Silvia Fernandes, Antonio Duran / Création lumière : Guilherme Bonfanti / Régie lumière : Jody De Neef / Stagiaire lumière : Ondine Delaunois / Musique Originale et Création sonore : Thomas Turine / Trompette : Ludovic Bouteligier / Régie son : Cédric Otte / Création vidéo : Fred Vaillant / Régie vidéo : Matthieu Bourdon / Régie générale : Fred Op De Beeck / Machinistes : Christophe Blacha et Stéphanie Denoiseux / Création costumes : Frédéric Denis, Laurence Hermant / Assistantes mise en scène : Eliana Monteiro, Maria Clara Ferrer / Traduction : Pauline Alphen / Coordination et production de la compagnie Teatro da Vertigem : Roberta Val / Réalisation décor et costumes : Ateliers du Théâtre National de Bruxelles / Une production du Festival d’Avignon, du Théâtre National/Bruxelles / Avec la participation de la compagnie Teatro da Vertigem / Avec le soutien du Programme Culture de l’Union européenne dans le cadre du projet Villes en scène/Cities on stage.
Avec l’aide de Petrobras et du Consulat de France à Sao Paulo.
Durée: 2 heures
Théâtre National de Belgique à Bruxelles
Du 27 mai au 7 juin 2014 (spectacle à LA BOURSE)
Avignon 2014
Hôtel des Monnaies
7 8 12 14 16 JUIL À 22H
9 10 13 15 17 JUIL
À 21H ET MINUIT
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