J’ai monté une première fois le Livre I de La République au printemps 1999 au Théâtre Gérard Philipe de Saint Denis. Le spectacle s’est produit en tournée dans les cours et jardins de la ville, puis s’est repris sur quelques saisons en festivals et en tournées de décentralisation. Alain Badiou avait assisté à l’une de nos représentations, de cette rencontre est née notre amitié, et peut être que le fait d’éprouver ce texte dans son incarnation a-‐t-‐il été pour quelque chose dans sa détermination à en proposer une traduction nouvelle. Aujourd’hui, Alain m’adresse la première épreuve de son texte, résultat de six années d’un âpre corps à corps avec le texte original ; la façon qu’il a de donner sens et vie à la pensée de Platon me réjouit et très naturellement, à mon tour, je veux revenir à ce dialogue.
Que Platon ait choisi de transcrire les conversations de Socrate sous forme de dialogues est un geste qui ouvre à la philosophie, dès l’origine, un espace de liberté – oui, la philosophie est vivante, elle s’improvise dans la rue, sur une place ou entre amis et nul n’a besoin d’être savant pour se risquer au jeu de la dispute ; oui, les dialogues philosophiques sont un genre à part entière, son public est populaire, son exercice est ludique et vivifiant.
Ma rêverie de mise en théâtre d’un texte commence toujours par la visualisation d’un espace de représentation. Je commencerai donc par là.
Un dialogue de Platon, comme en général tout dialogue philosophique, ne peut, à proprement parler être représenté, c’est à dire que l’on ne peut tenter de figurer ni la situation, ni les personnages qui en sont les protagonistes. On ne peut raisonnablement figurer le personnage de Socrate, comme on ne peut figurer la Villa du vieux Céphale au Pirée sans produire aussitôt une image factice qui ruinerait toute tentative de donner épaisseur et consistance au conflit des idées qui anime le dialogue.
Indépendamment des choix esthétiques, c’est le cadre de scène d’abord, par la séparation radicale qu’il opère entre la scène et la salle, entre les acteurs et les spectateurs, qu’il faut ici abolir, précisément parce que le cadre crée une mise à distance en isolant l’acteur au plateau et que c’est cette distance même qui fabrique l’idée d’une représentation des personnages. Extrait de la note d’intention de Grégore Ingold.
La République de Platon
Conversation dans une villa du port / Réduire le sophiste au silence / Questions pressantes des jeunes gens et jeunes filles
De Alain Badiou
Mise en scène et scénographie Grégoire Ingold
Avec Agnès Adam, Yves Beauget, Bounsy Luang-Phinith, Vincent Farasse, Redjep Mitrovitsa
Production déléguée : Balagan Système
Co-production : Théâtre Nanterre-Amandiers, Théâtre National Populaire, Théâtre d’Arras, Aria Corse
Avec le soutien de la région Rhône-Alpes, de la DRAC Rhône Alpes et du département de l’Isère
Le texte La République de Platon est publié aux éditions Fayard.
Durée 2h
Théâtre Nanterre-Amandiers – salle du planétarium
Du vendredi 15 novembre au dimanche 8 décembre 2013
Théâtre d’Arras
4 et 5 février 2014
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