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L’appel à la grève du sexe d’Ovidie

Les critiques, Lyon, Moyen, Paris, Théâtre
Anna Mouglalis dans La chair est triste d'Ovidie
Anna Mouglalis dans La chair est triste d'Ovidie

Photo Christophe Raynaud de Lage

Texte accusateur et tranché, La chair est triste hélas relate le renoncement de son autrice Ovidie à la pratique de la sexualité hétéro. Porté par Anna Mouglalis, seule en scène, le spectacle déploie un panorama désespéré et désespérant des relations hétérosexuelles, entre femmes soumises et hommes dominants, quitte à privilégier à la réflexion le ressentiment.

Quand on est un mâle, blanc, hétérosexuel, de plus de 50 ans, à peine, c’est avec une certaine appréhension qu’on se rend au spectacle d’Ovidie. La chair est triste hélas est l’adaptation pour le théâtre d’un texte, à la fois récit autobiographique et essai, dans lequel l’autrice féministe raconte comment et pourquoi, à partir de ses 38 ans, elle s’est mise à faire la grève du sexe hétéro. On a beau se croire en déconstruction, autant qu’on le peut, adhérer pleinement aux analyses des phénomènes de domination et de violence masculines dans notre société, on sait quand même qu’on risque d’en prendre pour son grade. D’autant que le dossier de presse annonce « un exutoire, un texte cathartique en écriture automatique, un discours de colère et de désespoir ».

Et la radicalité du propos est effectivement au rendez-vous. Le titre – La chair est triste hélas –, emprunté à un célèbre poème de Mallarmé intitulé Brise marine (« La chair est triste, hélas ! et j’ai lu tous les livres ») –, est certainement le seul moment de poésie d’un propos qui frappe plutôt par son franc-parler. Pêle-mêle : dans notre société, on juge les femmes sur leur « indice de baisabilité » ; lors des rapports sexuels, les hommes refilent des mycoses « parce que se laver les mains, c’est trop leur demander » ; les femmes font tout pour leur complaire, sinon « pourquoi s’épiler le sillon fessier ? » ; tout ça pour des pénétrations sans plaisir, des cunnilingus mal réalisés et autres pipes effectuées en pensant à son prochain mail. Le récit cru, direct, relate la montée progressive en son autrice d’un profond dégoût pour les relations hétérosexuelles, de « la grève de la pipe » à la grève du sexe, tout simplement. En cause, pour faire simple, la domination masculine à laquelle les femmes se soumettent. Phénomène qui aurait pour conséquence que « les hommes hétéros baisent mal », que les femmes se livrent sans réfléchir à la concurrence, à la rivalité dans lesquelles les hommes les cantonnent, et qu’en fin de compte, on perd beaucoup de temps, d’espoirs, d’argent et d’illusions dans des rapports sexuels très rarement satisfaisants, fussent-ils ou non mêlés à des sentiments.

Cette peinture ultra critique de la vie (sexuelle) hétéro est portée sur scène par Anna Mouglalis, vêtue de bleu gris, qui arpente le plateau à travers des lames de tissu descendant des cintres sur lesquelles sont régulièrement projetées des vidéos – très illustratives au début, plus décalées et intéressantes au fur et à mesure –, accompagnées de la musique de Geoffroy Delacroix. L’actrice au ton de voix si grave erre à travers cette forêt de colonnes comme une reine déchue au milieu des colonnes de son palais. Son allure douce et la dureté du propos contrastent avec bonheur, et c’est souvent avec malice qu’elle distille la prose tranchante d’Ovidie.

Pour autant, le propos a tendance à tourner en rond. La violence des hommes, leur machisme, leur propension à se croire de bons coups, leur désir obsessionnel des femmes jeunes… Tout y passe dans la galerie des attendus. Entre retour d’expériences foireuses et ironie teintée de colère d’une femme dégoûtée, le rire a du mal à se frayer un chemin, tout comme la réflexion à trouver celui de l’approfondissement. Ressassement plutôt que progression, La chair est triste hélas mitraille à tout va, mais s’aventure trop peu du côté de l’introspection, du questionnement, ne ménage aucun retournement dialectique, et dresse finalement un tableau trop monochrome pour être passionnant. Y persiste tout du long l’ombre d’une absence, celle de l’amour et de son hypothétique capacité à sublimer les relations. Possibilité abordée in extremis, grâce à un ailleurs que représenterait « un amour affranchi de la domination ». Mais tout aussi vite balayée : « Vous voyez bien que c’est strictement impossible », conclut le spectacle. Brassens l’avait dit : « 95 fois sur cent / la femme s’emmerde en baisant » pour en isoler une raison « s’il n’entend le coeur qui bat / le corps non plus ne bronche pas ». C’était avant que ne s’impose la grille de lecture, certes juste, mais ici exclusive à l’excès, de la domination masculine. Car ce serait véritablement à désespérer s’il n’existait pas, comme le relate Ovidie, de relations entre hommes et femmes hétéros, au moins un temps, un tant soit peu égalitaires et satisfaisantes, et animées d’une sexualité épanouissante.

Eric Demey – www.sceneweb.fr

La chair est triste hélas
de Ovidie (Éditions Julliard)
Adaptation et mise en scène Ovidie
Avec Anna Mouglalis
Collaboratrice à la mise en scène Marie Fortuit
Musique / Bande sonore Geoffroy Delacroix
Montage Barbara Bascou
Création lumière Robin Laporte
Scénographie Grégoire Faucheux
Costumes Jenn Pocobene

Production Théâtre de l’Atelier

Durée : 1h

Théâtre de l’Atelier, Paris
du 9 septembre au 25 octobre 2025

Théâtre de la Croix-Rousse, Lyon
les 28 et 29 novembre

12 septembre 2025/par Eric Demey
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