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« Biographies », le jonglage entre flow et flux

A voir, Cirque, Elboeuf, Le Mans, Les critiques, Lyon
La compagnie Ea Eo crée Biographies au Festival SPRING
La compagnie Ea Eo crée Biographies au Festival SPRING

Photo Marc Lahore

Avec Biographies, créé dans le cadre de SPRING – Festival international des nouvelles formes de cirque en Normandie, la compagnie Ea Eo poursuit sa passionnante recherche d’un langage centré sur les spécificités du jonglage, sur ce que lui seul peut dire. Accompagnée du rappeur Pierre Laloge, la jongleuse Neta Oren met des mots et des gestes sur sa pratique.

Dans l’humaine « ménagerie » des Fauves (2022), la précédente création de la compagnie Ea Eo et aussi l’une des plus amples pièces de jonglage de ces dernières années, le spectateur commençait par déambuler librement sous un vaste chapiteau bulle aux allures de vaisseau spatial. Il découvrait alors, sous la forme d’une exposition vivante, divers numéros exprimant autant d’approches techniques, intellectuelles, voire philosophiques du jonglage. Parmi les artistes qui déployaient leurs pratiques dans des espaces restreints, se trouvait notamment Neta Oren, co-directrice d’Ea Eo avec Eric Longequel. Enfermée dans un cube transparent, elle jonglait au rythme d’un rap écrit par Pierre Laloge que seuls des casques disposés autour de la cabine permettaient d’écouter. Avec cette petite forme à l’intérieur de la grande, la jongleuse habitait avec subtilité le mélange d’humour et de grand sérieux qui caractérise la compagnie dirigée par le couple depuis une dizaine d’années. Elle creusait un sillon personnel dans une interrogation jusque-là menée à deux sur le sens du jonglage et ses possibles, non seulement à travers les paroles du rap, mais aussi par le dispositif quasi muséal qui déplaçait les relations habituelles entre artiste de cirque et public. Avec Biographies, elle prolonge ce geste en invitant Pierre Laloge à la rejoindre au plateau, tandis qu’Eric Longequel signe la mise en scène et la co-écriture du texte.

Après la démonstration de force des Fauves, Ea Eo revient ainsi avec bonheur à son art singulier du jonglage intimiste et réflexif fondé sur les personnalités de Neta Oren et Eric Longequel. Ou du moins sur leurs identités de jongleurs, dont on a pu constater dans Unplugged (2021), créé avant Les Fauves, qu’elles sont avant tout relationnelles. Dans cette pièce structurée en dix parties ou « routines », terme désignant dans la discipline un enchaînement de figures, le duo accompagné d’un musicien et d’un invité différent chaque soir livrait une partie de son parcours jalonné de rencontres artistiques. Lesquelles sont certainement d’autant plus structurantes que le milieu où elles s’inscrivent, celui du jonglage considéré comme discipline autonome du cirque, compte un nombre de protagonistes encore assez limité. Dans Biographies, qui pousse, pour ainsi dire, à partir d’une autre pièce, la première relation en jeu est celle que la compagnie entretient avec sa propre histoire. Ce qui n’a rien de complaisant, bien au contraire. La seule existence de cette création prouve en effet à la fois l’existence d’une recherche au long cours et le désir d’en partager la fabrication, les coulisses. Ce qui ne va pas sans une certaine mise à nu, dont la profondeur tient ici pour beaucoup à un nouveau dispositif subtil contenu dans une scénographie circulaire de petite taille conçue par Jules Guerin, où la distance de Fauves entre voix et mots se trouve reconfigurée.

Décrit par Neta Oren à travers la bouche de Pierre Laloge, qui se fait son porte-pensée, ce dispositif est beaucoup plus qu’une technique astucieuse pour décrire le jonglage de l’intérieur. C’est l’un des sujets centraux de Biographies, qui réussit ainsi la prouesse de développer dans un seul mouvement une pensée critique et un objet ludique. Tenu pendant toute la première partie du spectacle, le pacte que posent d’emblée la jongleuse et le rappeur à travers la voix de celui-ci fait tenir ensemble le jeu et la pensée. « Celui qui lève la main à son bureau s’appelle Pierre. Il a un micro dans lequel il déclame mes pensées, mes mantras et mes doutes. Tout ce qui me passe par la tête, tout ce qui me passe par le cœur, tout ce qui me passe par les mains sort à la fin par la bouche de Pierre. Alors j’espère que je vais pas penser n’importe quoi ce soir », dit par exemple d’entrée de jeu le rappeur, tandis que la jongleuse s’échauffe en exécutant des petits bonds et en lançant d’abord une seule balle. Cette dissociation entre corps et mots évoque Circus remake de Maroussia Diaz Verbèke, dont la partition sonore entièrement composée d’extraits d’émissions de radio rappelle volontairement l’interdiction de parole qui a frappé le cirque en France à partir du XIXe siècle. Biographies a beau dire l’intimité d’une artiste, il appartient à une passionnante famille de cirque qui, en se questionnant lui-même, invite à poser un regard surpris sur le réel.

Très écrits, contrairement à ce que prétend la jongleuse par rappeur intermédiaire, les mots et les gestes de Biographies entrelacent sur un rythme de 160 bpm propos sur le quotidien et sur la vie du spectacle. Fondée sur les notions de répétition et de passage du temps, marquée par de grandes étapes, telles que l’accouchement et la maternité – des « putains de chorés », mises par l’artiste sur le même plan que celles qu’elle développe pour Ea Eo –, la pièce développe un spectaculaire très à distance des attendus liés au jonglage. Aussi dansant que technique, fluide, le style très personnel de Neta Oren se prête très naturellement à ce type d’approche. La deuxième partie du spectacle, où elle cesse ses routines jonglées pour se livrer avec son acolyte à la représentation d’une routine de tournée – arrivée au théâtre, spectacle, démontage – approfondit encore la mise en abyme au cœur de la proposition. La réflexion sur la nature et la fonction du spectacle que formule la jongleuse lorsque, à bout de gestes, elle prend enfin la parole est chargée de tout ce qui précède. « Le spectacle lui aussi est-ce qu’il a mal quand il se fait la malle ? / Où vont les spectacles quand ils meurent ? / Est-ce qu’on les incinère ? ». Depuis le flux de pensée très spécifique de la jongleuse, Ea Eo rejoint le grand flow pas bien heureux du monde et y injecte de la joie.

Anaïs Heluin – www.sceneweb.fr

Biographies
Texte Neta Oren, Eric Longequel, Pierre Laloge
Mise en scène Eric Longequel
Avec Neta Oren (jonglage), Pierre Laloge (rap)
Musique Jérémy Ravoux
Regard Étienne Manceau
Création lumière, conception et construction scénographie Jules Guerin
Régie de tournée Erwan Sautereau
Costumes Iorhanne Da Cunha

Production Compagnie Ea Eo
Partenaires confirmés Théâtre du Vellein scènes de la CAPI, Villefontaine – La Maison des jonglages, La Courneuve – Latitude 50, Marchin – Les SUBS, Lyon – ETAC, Bourg-en-Bresse – Théâtre des Clochards Célestes, Lyon – La Brèche, Pôle National Cirque Normandie – Le Plongeoir, PNC Le Mans – UP Circus & Performing Arts, Bruxelles – Le PALC, PNC Chalon-en-Champagne – Théâtre de la Croix Rousse, Lyon – Rayon C, Plateforme Cirque Bourgogne-Franche-Comté – CIRQU’AURA, Réseau Cirque en Région AURA – Ay-Roop, Rennes – MPTA (festival Utopistes) et le Collectif Petit Travers – Le Théâtre, Scène Nationale de Macon – La DRAC Ile-de-France

Durée : 1h

Vu en mars 2025 au Cirque-Théâtre d’Elbeuf, dans le cadre du festival SPRING

Latitude 50, Marchin (Belgique)
les 16 et 18 avril

Halle aux Draps, Tournai (Belgique), dans le cadre de La Piste aux Espoirs
les 19 et 20 avril

Maison du Théâtre et de la Danse, Épinay-Sur-Seine, dans le cadre de la Rencontre des Jonglages
le 7 mai

Maison des Jonglages, Bondy, dans le cadre de la Rencontre des Jonglages
les 17 et 18 mai

La Machinerie, Vénissieux, dans le cadre du festival utoPistes
le 23 mai

Festival Le Mans fait son cirque
en juin 2025

Les SUBS, Lyon
du 10 au 16 novembre

9 mars 2025/par Anaïs Heluin
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