« Passeport », le message politique d’Alexis Michalik sur les réfugiés
L’auteur et metteur en scène Alexis Michalik présente à partir de vendredi et pour cinq mois son nouveau spectacle, Passeport, au Théâtre de la Renaissance à Paris. Une histoire de réfugié, autour du personnage d’Issa, qui se réveille un jour dans le camp de la « Jungle » la tête ensanglantée, ayant totalement perdu la mémoire mais en possession d’un passeport érythréen.
Comment l’idée de ce spectacle à-elle germé ?
Il y a d’abord une histoire qui arrive, une idée qui a grandi… pendant deux ans. Pour moi, il était logique que ça démarre dans la Jungle de Calais (le camp a été démantelé en 2016). Puis je me suis renseigné, j’ai lu des témoignages d’associations, de réfugiés, sur l’immigration en France et dans le monde. Plus j’avançais dans mon histoire, plus il m’apparaissait évident que ça allait parler plus vastement de l’identité, de l’intégration et de notre rapport à l’immigration. Et que le centre du sujet allait être le point de vue du migrant, de ces demandeurs d’asile qui partent d’un pays en guerre et voyagent à grand péril pour arriver en Europe, où ce n’est que le début de la galère administratif. C’est une façon de raconter ce qu’est ma vision de la société française et comment elle pourrait avancer, être même plus ouverte. Je pars du principe qu’une société se nourrit de la nouveauté, de ses apports, de son immigration.
Pourquoi avoir pour partenaires le Musée de l’Histoire de l’immigration à Paris et l’association Les Cuistots migrateurs, qui emploie des cuisiniers réfugiés ?
Ils vont parler de la pièce et, nous, on les intègre dans la promotion. Ce que je veux, c’est qu’en sortant de la pièce, si des gens se disent : « Ca m’a touché, qu ‘est-ce que je fais ? », ils ont des pistes vers des associations qui fournissent à l’accueil des migrants. Et lors de la Journée mondiale des réfugiés (en juin), on va essayer de donner la recette de la représentation à l’HCR (l’agence des Nations Unies pour les réfugiés). J’ai parfaitement conscience que ça reste une pièce de théâtre qui s’adresse à une petite partie de la population. Néanmoins, une œuvre peut avoir un petit impact et apporter un contrepoint à ce discours assez +réac+ en ce moment autour de la loi immigration.
Votre spectacle démarre un mois après le vote du texte controversé…
Cette loi (qui n’a pas été promulguée et est en cours d’examen par le Conseil constitutionnel) est un sacré recul des droits des étrangers. Or Emmanuel Macron avait promis de tenir compte du fait qu’on avait voté contre le RN (en votant pour lui au deuxième tour de l’élection présidentielle). On ne fait que rentrer dans un État qui se droitise, se durcit et se déshumanise. C’est une victoire idéologique pour le RN.
Vous portez donc un message politique ?
Je me défends souvent d’avoir un discours politique, tout simplement parce que j’ai l’impression d’enfoncer des portes ouvertes. Toutes mes pièces ont un certain message. On verra, mais cette pièce va être plus clivante qu’Edmond (sur l’écriture de Cyrano de Bergerac)!
Dans la mise en scène, on retrouve votre marque de fabrique : rebondissements, effets de surprise…
Je veux raconter des histoires qui arrivent au spectateur. Ce côté rythmé vient des séries, du cinéma, de la BD, des romans et de scène plein de metteurs en scène que j’admire. J’ai grandi en voyant les spectacles de Simon McBurney, Peter Brook, Ariane Mnouchkine, (Jérôme) Savary , Wajdi Mouawad, (Jean-François) Sivadier et tant d’autres. Je m’inscris dans leur lignée. Je n’ai rien inventé.
Karine Perret © Agence France-Presse
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