C’est un symbole de Broadway qui disparaît: après 13.981 représentations en 35 ans, Le Fantôme de l’Opéra, la plus ancienne comédie musicale du célèbre quartier des théâtres de New York, a définitivement baissé le rideau dimanche, victime d’audiences trop faibles après la pandémie.
Moment fort du spectacle, le lourd et majestueux lustre de l’Opéra a chuté pour une dernière fois au Majestic Theatre, l’écrin historique près de Times Square de l’œuvre théâtrale et musicale créée par Andrew Lloyd Webber, à partir du roman français de Gaston Leroux. En présence de son créateur, l’équipe du spectacle a reçu une longue ovation du public debout, applaudissant à tout rompre, pendant que le fameux lustre faisait une toute dernière apparition dans la salle bondée de 1.600 places.
Andrew Lloyd Webber, qui a composé des morceaux pour le couronnement en mai de Charles III, a dédié ce spectacle à son fils décédé d’un cancer en mars. « Merci à tous, merci New York d’être une maison formidable pour nous ». C’était une dernière représentation « extraordinaire », selon Daniel Wright, 56 ans, un spectateur qui avait déjà assisté à plusieurs représentations. « Il y a eu tellement de moments où j’ai pleuré, j’en ai eu la chair de poule, c’était juste un spectacle bien conçu », a-t-il raconté à l’AFP. « Il y a des raisons pour lesquelles ce spectacle existe depuis 35 ans. C’est un classique intemporel, qui a touché tant de gens ».
Au total, depuis sa première new-yorkaise en 1988, l’histoire du fantôme qui vit caché dans les souterrains de l’Opéra de Paris et tombe amoureux de la ballerine Christine aura rapporté 1,4 milliard de dollars de recettes (1,27 milliard d’euros), attiré près de 20 millions de spectateurs, et fait travailler environ 6.500 personnes, dont 450 comédiens, estime la production. Deux ans après sa création à Londres, où l’oeuvre continue d’être jouée, The Phantom of the Opera s’était imposée à Broadway comme une superproduction avec son orchestre et ses costumes d’époque. Elle avait triomphé aux Tony Awards, l’équivalent des Oscars pour Broadway, remportant sept récompenses en 1988.
Mais « le monde a changé », soulignait dans le New York Times en septembre 2022 le producteur britannique Cameron Mackintosh. Il expliquait qu’après la pandémie de Covid-19, qui a fermé Broadway pendant 18 mois, le spectacle, très dépendant des touristes internationaux, était devenu trop cher – « un peu moins de 950.000 dollars nets » par semaine – pour ses recettes. Entre musiciens, comédiens et techniciens, il faut environ 125 personnes pour le faire tourner. « Il y a un point de bascule, où le nombre de bonnes semaines a trop diminué pour compenser les semaines perdues, et à ce moment-là, il n’y a qu’une seule décision sensée à prendre », avait-il ajouté, sur fond de succès à Broadway pour les biopics musicaux comme MJ : The musical sur Michael Jackson.
500 dollars la place
« Dans nos rêves d’enfant les plus fous, nous n’aurions jamais pu imaginer le succès de Phantom » explique Cameron Mackintosh. L’annonce de la clôture avait relancé les entrées, à tel point que le couperet a été repoussé de février à avril et certains se demandent si une tournée ne sera pas annoncée. Cette semaine, les dernières places se vendaient plus de 500 dollars sur les sites de réservations. D’importants travaux de rénovation vont être entrepris au Majestic Theatre. Désormais, la comédie musicale la plus ancienne jouée à New York sera Chicago, dont la première remonte à 1996, devant Le Roi Lion.
Poumon culturel et touristique de New York, les 41 théâtres de Broadway, où se pressent environ 200.000 et 300.000 spectateurs par semaine, rapportent en moyenne plus de 30 millions de dollars de recettes hebdomadaires.
Andréa Bambino et Cecilia Sanchez © Agence France-Presse
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