L’état de santé de Richard Martin, 79 ans, le directeur du théâtre Toursky s’aggrave. Les médecins qui veillent sur Richard Martin, directeur à Marseille du théâtre Toursky, font savoir dans un communiqué « qu’au seizième jour de sa grève de la faim, son état de santé se détériore sur le plan physiologique et devient préoccupant, et justifie une hospitalisation ». Richard Martin a entamé mardi 7 février 2023 une nouvelle grève de la faim (la 4e depuis qu’il dirige le théâtre) et s’est engagé dans un bras de fer avec la municipalité de Marseille sur l’avenir du lieu, implanté depuis 52 ans dans le quartier Saint-Mauront (3ème arrondissement).
« Il était comme mon frère, je l’aimais, je ne comprends pas ! », lançait récemment Richard Martin, lors d’une conférence de presse, évoquant l’actuel adjoint à la culture de la mairie de Marseille, le communiste Jean-Marc Coppola, fervent soutien du site quand il était dans l’opposition.
« On m’aurait dit il y a deux ou trois ans que j’allais me retrouver dans une telle situation, jamais je n’y aurais cru », reconnaît auprès de l’AFP l’élu, arrivé à l’hôtel de ville après la victoire de la coalition de gauche en 2020. Aujourd’hui, l’incompréhension domine entre les deux camps. En cause: la suppression de 80.000 euros de subventions par la mairie (sur un total de près de 1 million, pour un budget d’environ 2 millions) et des questions autour de l’avenir du théâtre et de l’éventuelle succession de Richard Martin, 79 ans.
Pour se faire entendre, ce saltimbanque proche de Léo Ferré a dégainé une nouvelle fois son arme favorite, entamant le 7 février sa… quatrième grève de la faim, après celles menées contre « les politiques culturelles désastreuses » de Valéry Giscard d’Estaing en 1981, de la Direction des affaires culturelles de Provence-Alpes-Côte d’Azur en 2009 et du maire de Marseille Jean-Claude Gaudin en 2019. Il est soutenu par beaucoup d’artistes, de Philippe Caubère à Marie-Claude Pietragalla en passant par Pierre Arditi.
Au-delà de la subvention rabotée –une volonté de « rééquilibrer » les aides « largement comprise » dans le secteur culturel selon Jean-Marc Coppola–, la volonté de la mairie de remettre à plat ses relations avec la compagnie, qui occupe un bâtiment municipal, cristallise aussi le conflit.
La municipalité souhaiterait signer avec la compagnie une convention d’occupation temporaire d’un an, avant un appel à projets, pour se remettre en conformité avec la loi.
Implanté depuis 1970 au cœur du 3e arrondissement de Marseille, un des quartiers les plus pauvres d’Europe, le Théâtre Toursky, dont la plus grande salle compte quelque 700 places, accueille chaque année une cinquantaine de spectacles, dont des créations.
Mais Richard Martin et sa troupe occupent le théâtre « sans droit ni titre depuis 2014 », résume Jean-Marc Coppola. Le metteur en scène et comédien s’appuie sur une convention d’occupation signée avec la municipalité Vigouroux dans les années 1980, « reconduite tacitement » depuis. Et il occupe toujours le bâtiment, moyennant 283 euros par an, pour un lieu dont la valeur locative s’établit à 75.000 euros selon M. Coppola.
« J’ai apporté à cette ville une réputation dans le monde entier, je pense avoir mieux servi le développement culturel populaire que tous les discours », s’enflamme auprès de l’AFP Richard Martin, toujours fier, plus de 20 ans après, d’avoir fait venir la soprano américaine Barbara Hendricks « au milieu des HLM », pour les 30 ans de son théâtre. « J’ai presque l’impression que je dois leur demander combien je leur dois », déplore-t-il en évoquant la municipalité. « Et en plus aujourd’hui on me dit de candidater à ma propre succession ? », poursuit-il, s’interrogeant sur un éventuel « règlement de compte politique » dû au soutien qu’il avait apporté à un dissident de droite lors des municipales de 2020.
Les subventions, « ce n’est pas un dû », répond Jean-Marc Coppola, réfutant toute idée de « punition » ou de « sanction »: « Il y a une salle de spectacle qui est située dans un bâtiment municipal, qui est financée à 75% par de l’argent public (en comptant les autres subventions versées à la compagnie, ndlr), on ne peut pas s’émanciper de règles et de contraintes ». « Ce n’est pas un conflit de personnes (…), je n’ai jamais parlé d’âge ou de chasser qui que ce soit, j’ai simplement parlé de transmission, parce que moi je veux préparer l’avenir et développer la culture à Marseille , conclut l’élu: « S’il y a une bataille à mener, et je suis prêt à la mener avec eux et tous les acteurs culturels, c’est de dire que dans notre pays, il n’y a pas assez d’argent public pour la culture ».
© Agence France-Presse
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