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ADN, la gêne de la violence

A voir, Les critiques, Paris, Théâtre

photo Ema Martins

Mars ou Vénus ? Chimpanzé ou bonobo ? Quelle est notre nature profonde ? A travers l’histoire d’une bande de jeunes qui pousse à mort le harcèlement d’un camarade, Dennis Kelly traque l’ADN de l’être humain, ses pulsions, sa conscience morale et les dynamiques de groupe. Un programme alléchant que l’adaptation de Marie Mahé condense efficacement.

Il y a 15 ans, on parlait peu de harcèlement scolaire mais, dans ADN, la mécanique qui conduit un groupe d’adolescents à commettre l’irréparable vis-à-vis de l’un de leurs camarades y est admirablement exposée. De l’intérieur, Dennis Kelly décrypte les rapports d’une micro-société de jeunes gens, non pas dans une visée sociologique, mais parce qu’ils expriment en dehors de leur âge quelque chose de notre humanité à tous. Entre chimpanzé agressif et bonobo empathique (et sensuel), chaque être humain promène pour l’auteur anglais un ADN d’autant plus incertain que nos comportements d’animal sociable s’imprègnent de l’influence des groupes dans lesquels nous évoluons. Et la bande de Phil, Léa, Cathy et John a du sang sur les mains. A l’impropre comme au figuré. Les personnages ne cessent d’ailleurs d’essayer, en vain, de s’en débarrasser. Signe d’une mauvaise conscience – c’est bien le moins – qui ne les lâchera plus une fois qu’ils auront commis le pire. D’autant que de Charybde en Scylla, guidés par Phil, leur démiurge taiseux, ils progressent dans l’ignoble pour tenter de s’en sortir.

La comédienne et metteuse en scène Marie Mahé a décidé d’adapter le texte de l’auteur anglais en réduisant notablement le nombre de personnages. John interprété par un Tigran Mekhitarian irrésistiblement drôle en meneur borderline, manipulateur et menaçant qui joue son autorité au chantage affectif cède ensuite son leadership à Phil, cerveau froid et insensible, intéressé seulement par la junk food et ses slogans publicitaires, qui sauve la mise au groupe en l’embarquant cependant dans des logiques dénuées de toute morale. Léa, elle, en pince pour Phil mais résistera à l’immoralité générale. Contrairement à Cathy, qui, bien qu’interprétée par Marie Mahé la metteuse en scène, a plus le rôle d’une suiveuse. Si dans cette adaptation, les rapports de groupe évoluent, et parfois échappent un peu – disparition étrange de John, impassibilité rémanente de Phil qui fait stagner le personnage – c’est surtout cette quête de l’ADN de notre humanité qui structure la pièce. Portée par les monologues de Léa, l’interrogation aux allures métaphysiques – en arrière-plan, le détail grossi des doigts de Dieu et d’Adam, tendus l’un vers l’autre, mais qui ne parviennent pas à se toucher dans le tableau de Michel-Ange – est longuette par moments mais elle côtoie, complète et donne une indéniable profondeur à cette fable aux allures de thriller policier, les quatre camarades tentant d’échapper aux conséquences judiciaires de leur crime.

La langue de Dennis Kelly fait le reste. Ponctuée de phrases inachevées, de répétitions qui font fluctuer le sens, le voient flotter, parfois se renverser, elle est impeccablement prise en main, et en bouche, par les quatre interprètes. La scénographie dépouillée, un banc défraîchi de parc urbain au centre du plateau laisse parfaitement se déployer les lieux, les ailleurs évoqués par les personnages : l’école, la ville, le bois… Et la musique rap ou le fameux dance monkey pris en mode trans ancrent la pièce dans notre présent récent. On aurait peut-être souhaité échapper au look jogging ou aux vagues évocations du réchauffement climatique qui dévoient l’abstraction de la fable. Et saisir un peu mieux les ressorts des personnages. Mais ce que le texte perd en précision, il le gagne en étrangeté. Jusqu’au bout ainsi, l’attention reste tendue vers un univers si loin si proche, si irréel et si parlant. C’est la signature d’un spectacle somme toute réussi que de maintenir en tension des composantes contradictoires. Le texte de Kelly revu par Mahé s’attarde peut-être un peu trop sur la poétique des choses, mais il en rend le concret avec force.

Eric Demey – www.sceneweb.fr

ADN
texte Dennis Kelly
traduction Philippe Le Moine
adaptation et mise en scène Marie Mahé
avec Maxime Boutéraon, Léa Luce Busato, Marie Mahé, Tigran Mekhitarian en alternance avec Achille Reggiani
scénographie Marie Mahé, Isabelle Simon
costumes Marie Mahé
lumières Édith Biscaro artiste-peintre Yol
production Dorothea Kaiser
diffusion Matrioshka Productions
presse Pascal Zelcer
production Compagnie DTM 9.4 en coproduction avec Les Passerelles, scène de Paris – Vallée de la Marne et Matriochka Productions avec le soutien de la DGCA, du Fonds de soutien AF&C, de la MC93, de la Spedidam, de l’Adami et la participation artistique du Jeune théâtre national en coréalisation avec le Théâtre de la Tempête
La pièce ADN de Dennis Kelly dans la traduction de Philippe Le Moine est publiée et représentée par L’Arche éditeur – agence théâtrale.

Durée : 1h20

du 23 novembre au 3 décembre 2023
Au Théâtre Paris Villette
mardi, jeudi et samedi à 20h. mercredi et vendredi à 19h. dimanche à 15h30

 

25 novembre 2023/par Eric Demey
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