Harold David et Laurent Domingos sont les deux nouveaux vice-présidents de l’association AF&C qui coordonne le Off. Ils ont été élus mi-avril. Laurent Domingos est comédien, metteur en scène, directeur artistique de la Compagnie Minuit44 et président des Sentinelles, fédération de compagnies du spectacle vivant. Harold David est co-directeur de l’Atypik, de l’Archipel Théâtre et du Rouge Gorge. Ils ont présenté les grandes lignes du Off 2022, avec 1570 spectacles diffusés dans 138 lieux, rassemblant 1094 compagnies.
Vous attendiez-vous à avoir autant de spectacles, comme il y a deux ans ?
Harold David : Oui, de mon côté, je m’y attendais. Dans les théâtres que je dirige, il y a plus d’un tiers de spectacles qui sont des reports de 2020 et 2021, et il ne faut pas oublier que pendant toute la période de confinement, notamment les deuxième et troisième, le ministère de la Culture a encouragé les artistes à travailler dans les salles. Du coup, ils ont produit de nouveaux spectacles. Donc oui, on s’attendait à ce qu’il y ait une reprise. Est-ce qu’elle va durer ? Il faudra voir en 2023, si on est vraiment dans une reprise à l’identique ou si c’est un effet de rebond de l’édition antérieure et de cette politique volontariste d’encourager la création pendant le confinement.
Laurent Domingos : En fait, ces chiffres peuvent impressionner, mais c’est la capacité de diffusion qui compte, la façon dont ces spectacles vont vivre. Moi, j’aimerais qu’il y en ait 6000 et que les 6000 puissent vivre, que le spectacle vivant soit jugé comme essentiel et consubstantiel à la cité.
La grande inconnue est de savoir s’il y aura des spectateurs à Avignon…
Harold David : Vous avez dit le mot juste. C’est une inconnue. On n’a pas de boule de cristal magique pour savoir si les spectateurs seront au rendez-vous. On espère évidemment que le public aura à cœur de retrouver l’esprit de fête qui caractérise sa présence au sein du Festival Off d’Avignon, mais c’est vrai que, là, c’est une vraie inconnue. Malheureusement, on ne pourra vraiment tirer des conclusions sur la capacité du public à revenir dans les salles qu’après les quinze premiers jours du Off pour avoir vraiment une tendance claire. Mais c’est un vrai risque pour toutes les compagnies et tous les lieux. Il y a une incertitude sur la fréquentation. On espère que l’engagement fort des artistes et des compagnies donnera confiance et envie aux spectateurs d’être là avec eux.
Laurent Domingos : La baisse de fréquentation dans les salles est liée à une multitude de facteurs. Comment fait-on pour s’en sortir ? Comment faire pour que les gens puissent se dire que l’échange des émotions entre des êtres vivants n’a pas de prix et qu’il faut aller voir du théâtre ? Qu’il faut amener les enfants ? C’était une chose très simple dans le passé de notre histoire, maintenant c’est devenu un peu plus complexe. Il faut travailler à ça. Moi, je préfère travailler à ça plutôt que de me demander comment limiter l’offre.
Généralement, à la fin du festival, il y a toujours des compagnies qui jettent l’éponge. Est-ce qu’il y en aura malheureusement plus cette année ?
Laurent Domingos : C’est difficile à évaluer. On essaie qu’il y en ait le moins possible. Il faut que les compagnies sachent pourquoi elles y vont. Il faut qu’elles aient fait un plan d’attaque. On ne va pas à Avignon la fleur au fusil, ça n’est plus possible. On n’est plus dans les années 70, 80, 90 où il y avait très peu de spectacles. Il faut y aller de façon rationnelle. Ce n’est pas facile de dire à un artiste qu’il faut être rationnel, et heureusement, d’ailleurs, parce qu’il faut que les artistes ne soient pas rationnels. Mais dans certains cas, il faut l’être un tout petit peu, notamment quand on gère une compagnie. Et il faut pouvoir aller à Avignon en se disant : combien j’espère vendre de dates ? Est-ce que j’ai un budget raisonnable ? Il faut aussi responsabiliser les compagnies, qu’elles aillent à Avignon uniquement si elles pensent que stratégiquement c’est intéressant. Et nous, on est là aussi pour les aider.
S’ajoute, cette année, le problème de l’augmentation des coûts de production…
Laurent Domingos : A Avignon, il y a de moins en moins de spectacles avec beaucoup de comédiens, parce qu’on essaie de diminuer les coûts. Il y a aussi très peu de décors, non seulement parce que les décors sont difficiles à mettre en place, mais aussi parce qu’un décor, ça coûte cher et que cela nécessite de la manutention. Et donc les compagnies essaient de diminuer les coûts. On travaille avec nos partenaires au sein d’Avignon à baisser les coûts, notamment pour le logement, mais c’est malheureusement à la marge. Et on ne peut rien faire sur le prix des billets de train ou sur le coût de l’énergie que tout le monde subit.
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