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A Rouen, une Jenůfa provocante et bouleversante

A voir, Les critiques, Opéra, Rouen

Natalya Romaniw © Marion Kerno Agence Albatros

L’Opéra de Rouen Normandie reprend la mise en scène de Jenůfa signée par Calixto Bieito à Stuttgart il y a quinze ans. D’une formidable intensité musicale et dramatique, le spectacle place le chef-d’œuvre de Janáček dans un cadre empreint de violence et d’oppression dévastatrices.

Dans ce travail réalisé en 2007 et présenté pour la première fois en France, Calixto Bieito atteint un haut degré de puissance dramatique et émotionnelle en développant l’esthétique trash et bariolée qui fait son incontestable popularité sur les scènes lyriques internationales. L’artiste catalan montre aussi son intérêt profond pour les petites gens. Dépourvue d’ironie et pleine d’empathie, sa mise en scène rend compte de la rudesse avec laquelle le sort s’acharne et malmène les individus. L’âpreté décapante qui caractérise son geste ne peut se départir d’une certaine tendresse.

Pour écarter tout folklore de sa représentation sans chercher à contrarier ni la musique ni le livret, Calixto Bieito prend pour décor contemporain, un vaste entrepôt industriel qui se présente à la fois comme un squat sordide aux murs recouverts de tags servant de décharge de vieux tissus et comme un atelier où de petites mains s’affairent à l’ouvrage derrière une batterie de machines à coudre. Plutôt que villageois, le milieu dépeint est davantage celui du monde ouvrier, parfois joyeux, souvent hostile. On y voit les gens vivre, travailler, lâcher prise et se dévoyer à l’occasion d’une fête qui dérape dans l’avilissement. Bieito est bien à son affaire pour hypertrophier les rapports de force et de sexe qui irriguent l’intrigue, comme pour faire advenir de manière cinglante, la tragédie intime et sociale qui se joue. Si sa mise en scène assume une part de prosaïsme et d’outrance, elle dessine avec soin chaque personnage et amène les interprètes à explorer jusque dans des retranchements sombres leurs passions destructrices, leur humanité blessée et leur force de combativité.

On doit l’indéniable force de la représentation à la vision et la direction au cordeau du metteur en scène mais aussi à une direction musicale et une distribution de haut niveau. L’éprouvant rôle-titre est vigoureusement incarné par la soprano Natalya Romaniw dont la voix de belle ampleur, le timbre chaud et charnel, conviennent parfaitement. Avec de fiers moyens vocaux et une présence incendiaire, Christine Rice donne à voir toute la crudité mais aussi la vulnérabilité de Kostelnička qui assassine à main nue sur une vulgaire table de cuisine le bébé enfanté par l’héroïne avant de s’engouffrer jusqu’aux confins de la folie. Solidement campé par Dovlet Nurgeldiyev, Steva fait voler les billets de banque, siffle les bouteilles d’alcool et tripote les filles, il passe ainsi pour le flambeur sans vergogne qu’il est tandis qu’à l’opposé, c’est un Luca volontairement risible mais infiniment touchant dans sa maladresse que défend avec conviction Kyle van Schoonhoven dont la voix claire est fort bien projetée.

Sous la direction très engagée de Antony Hermus, l’orchestre dévoile moins la tendre pitié pour la faiblesse humaine que la franche vitalité et l’urgence effrénée avec laquelle tente de se conjurer le malheur. Sans retenue, de brusques et tranchants élans instrumentaux rendent l’atmosphère particulièrement tendue et suffocante. Une rugosité nerveuse embrase musiciens et spectateurs jusqu’au cataclysme.

Christophe Candoni – www.sceneweb.fr

Jenůfa
Direction musicale Antony Hermus
Mise en scène Calixto Bieito
Reprise de la mise en scène Nina Dudek
Chef de chœur Lukáš Vasilek
Scénographie Susanne Gschwender
d’après des esquisses de Gideon Davey
Costumes Ingo Krügler
Lumières Reinhard Traub

Jenůfa Buryja Natalya Romaniw
Kostelnička Buryjovka Christine Rice
Laca Klemeň Kyle van Schoonhoven
Števa Buryja Dovlet Nurgeldiyev
Stařenka Buryjovka Doris Lamprecht
Stárek Yoann Dubruque
Le maire du village Victor Sicard
La femme du maire Aline Martin
Karolka Séraphine Cotrez
Pastuchyňa Lise Nougier
Barena Yete Queiroz
Jano Clara Guillon

Orchestre de l’Opéra de Rouen Normandie
Chœur accentus / Opéra de Rouen Normandie

Rouen, Théâtre des Arts
Mardi 26 avril 2022, 20h
Jeudi 28 avril 2022 , 20h
Samedi 30 avril 2022, 18h

2 mai 2022/par Christophe Candoni
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