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Kohlhaas, un justicier frontal et radical

A voir, Les critiques, Paris, Théâtre
Gianmarco Bresadola

© Gianmarco Bresadola

Simon McBurney et Annabel Aden portent à la scène Michael Kohlhaas et tirent le récit de Kleist vers le monde contemporain dans une version théâtrale fortement captivante à voir au Printemps des comédiens.

Après deux ans de pandémie, le festival Montpelliérain renoue enfin avec la scène internationale en programmant entre autres pas moins de deux emblématiques institutions berlinoises. En attendant de découvrir la prochaine grosse production de Julien Gosselin qui s’aventurera au cœur de la littérature allemande avec l’équipe de la Volksbühne, on retrouve le britannique Simon McBurney dirigeant la célèbre troupe de la Schaubühne qu’il connaît bien pour y avoir déjà monté La Pitié dangereuse de Stefan Zweig. Il s’empare cette fois d’une court roman de Heinrich von Kleist qu’il met en scène dans un spectacle ambitieux et audacieux.

Marchand prospère, le maquignon Kohlhaas est arbitrairement arrêté à un poste de douane improvisé entre le Brandebourg et la Saxe alors qu’il se rend à la foire pour vendre ses meilleurs chevaux. Parce qu’il ne peut présenter le laisser-passer qui lui est illégalement demandé, il se voit obligé d’abandonner derrière lui deux de ses bêtes et son fidèle valet. De retour, il retrouve ses animaux à l’agonie et son serviteur battu jusqu’au sang. Le héros multiplie les recours auprès des puissants du pays. Ses démarches continuellement déboutées n’aboutissent à rien. Point culminant du drame qu’il vit : il perd sa femme, Lisbeth, sauvagement assassinée. Assoiffé de vengeance, il lève une armée et mène une guerre féroce au nom de la justice qu’il réclame en vain.

Tandis que la représentation commence à la manière d’un austère oratorio et que les comédiens s’apparentent à de stricts conférenciers derrière des pupitres et des micros disposés en ligne, l’ensemble ne tarde pas à s’animer, se densifier, dans un jeu hyper-frontal et sous haute tension. L’inventif metteur en scène Simon Mcburney propose un spectacle habilement polyphonique, écrit avec la précision d’une partition musicale dans laquelle six acteurs-solistes prennent en charge la narration diffractée tout en donnant corps et voix à tous les rôles de l’histoire. Sur un rythme infernal et en une fraction de seconde, ils passent de l’un à l’autre avec autant de dextérité que d’ingénuité. C’est ainsi que les personnages et leurs péripéties prennent vie, avec presque rien, au moyen de simples éléments de costumes et accessoires.

Fidèle à son goût pour la technologie, Simon McBurney convoque les écrans, les téléphones portables et caméras. Son utilisation de la vidéo en direct trouve toute sa pertinence dans la manière qu’elle a de rapprocher le classique de Kleist écrit il y a 200 ans du monde contemporain et de faire écho à l’actualité en laissant apparaître, par flashs et sans effets sensationnalistes, des images d’émeutes urbaines, de ville à feu et à sang, une violence insupportable maximalisée par une bande-son cinématographique notamment émaillée de puissantes rafales de mitraillettes.

Une impressionnante ébullition s’empare alors du plateau dont toutes les ressources sont formidablement exploitées : l’image, le son, la technique mais surtout le jeu brut, entier, totalement engagé des interprètes allemand, une fois de plus, virtuoses. Moritz Gottwald et Laurenz Laufenberg, tous deux excellents, corps presque nus, maigrement maintenus sur de fines béquilles, endossent entre autres les figures de chevaux émaciés. Renato Schuch campe le protagoniste avec une présence folle. A l’opposé de Mads Mikkelsen implacablement stoïque devant la caméra d’Arnaud des Pallières, l’acteur fait un Kohlhaas tout aussi grave mais dont la rébellion s’exprime de façon autrement plus sauvage et viscérale. L’homme est représenté comme un être sombre mais aimant qui tient d’ailleurs dans ses bras son cher enfant (une poupée de chiffon). il est assurément bon, honnête, déterminé à faire le bien avant de commettre le pire. Victime d’injustice et voulant rétablir son bon droit, il fait lui-même sa propre loi et devient un barbare fanatique ivre de rage. C’est toute la complexité et l’inconfort devant lesquels la pièce installe le spectateur. Orchestrateur du chaos, l’homme condamnable suscite néanmoins une compassion confondante. Kohlhaas produit alors une profonde et sensible réflexion existentielle et universelle.

Christophe Candoni – www.sceneweb.fr

Michael Kohlhaas
D’après Heinrich von Kleist
Mise en scène Simon McBurney, Annabel Arden
Avec : Robert Beyer, Moritz Gottwald, Laurenz Laufenberg, David Ruland, Genija Rykova et Renato Schuch

Scénographe : Magda Willi
Costumes : Moritz Junge
Son : Benjamin Grant
Collaboration sonore : Joe Dines
Vidéo : Luke Halls
Collaboration vidéo : Zack Hein et Sébastien Dupouey
Dramaturge : Maja Zade
Lumières : Erich Schneider

Direction de production Londres/GB : Judith Dimant/Wayward Productions.
En coopération avec Wayward Productions, Londres.

Printemps des Comédiens 2022
Domaine d’O – Théâtre Jean-Claude Carrière
Jeudi 26 Mai 19:00
Vendredi 27 Mai 19:00
Samedi 28 Mai 19:00

27 août 2023/par Christophe Candoni
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