Plus qu’un récit autobiographique, Enfance est une plongée vers le lointain, un travail de sourcier, une recherche de sensation qui exige le vrai. Aussi, entre l’auteur et elle-même, un dialogue s’établit, une contradiction, une contraction permanente pour vérifier.
La mise en scène épouse ce mouvement : d’où vient la parole ? Qui parle ?
L’enfant Sarraute ? L’écrivain ? « Il me semble que là s’arrête pour moi l’enfance… » nous dit Sarraute à la fin de son livre « quand je regarde ce qui s’offre à moi maintenant, je vois comme un énorme espace très encombré, bien éclairé. »
À rebours donc, l’enfance pour elle c’est un espace nu, flou. Cela nous engage, avec Morgane et Christophe Grelié, à réfléchir sur l’espace vide cher à Peter Brook, sur le proche et le lointain. « Pour nous toucher réellement il faut que le théâtre soit à la fois lointain et proche », nous dit
Peter Brook.
N’est-ce pas ainsi qu’est l’enfance ? Proche puisqu’elle nous constitue et si éloignée dès que nous voulons la retrouver. Pour Nathalie Sarraute justement, les souvenirs qu’on remonte de son enfance sont entourés « d’une couche protectrice, molle, ouatée. ».
On songe au sfumatto de Vinci, à la proximité et au mystère… Cette brume, cet écran de fumée, nous nous efforcerons de le matérialiser; il appartiendra aux actrices de le déchirer pour faire entendre la voix de
Nathalie Sarraute.
Tristan Le Doze
Enfance de Nathalie Sarraute
Mise en scène Tristan Le Doze
Avec Anne Plumet , Marie Madeleine Burguetdu 6 mars au 20 avril 2024
Au Théâtre de Poche Montparnasse
du mardi au samedi à 19h
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