La nomination du metteur en scène Yves Beaunesne à la tête du Centre Dramatique Régional de Poitou-Charentes pour succéder à Claire Lasne-Darceuil a fait couler beaucoup d’encre depuis le début de l’année. Une nouvelle fois, comme pour la nomination à la Criée, les tutelles ont montré leurs divergences. Yves Beaunesne n’était pas le candidat de la Région. Il ira bien dans le Poitou avec sa nouvelle équipe, et pour apaiser tout le monde, les tutelles ont décidé au début du mois d’avril de donner au Centre Dramatique du Poitou-Charentes, le label CDN. Du coup la part de l’Etat va passer à 50% dans le budget. Fin du premier acte. Yves Beaunesne qui actuellement prépare On ne badine pas avec l’amour avec les comédiens de la Comédie-Française (première au Vieux-Colombier le 11 mai) peut désormais penser à ses projets.
Depuis le 1er janvier vous êtes directeur du Centre Dramatique Régional de Poitou-Charentes. Votre arrivée a provoqué la démission d’une partie de l’ancienne équipe de Claire Lasne. Comment vivez-vous cette situation ?
Je suis dans un étau, otage de cette situation. Le contribuable et le spectateur le sont aussi. Moi qui n’aime pas les polémiques, je fais tout pour apaiser les esprits, et transformer une situation qui est de l’ordre du citron en limonade. Il faut sortir par le haut. J’ai découvert les différents entre les tutelles, l’Etat et la Région quelques jours après ma nomination. Comment cela s’est passé entre elles, je l’ignore et cela n’est pas de mon ressort. Et je n’ai pas envie de le savoir, car j’ai candidaté selon la procédure légale. Leur décision est politique, même si ma nomination s’est faite sur des critères artistiques, je l’espère. J’ai donc découvert avec surprise que ma nomination été connotée d’insatisfaction et de polémiques. Les tutelles se sont vues il y a quelques jours et il a été décidé de sortir de cette histoire pénible pour tout le monde. Mes arguments ont été entendus. J’ai un vrai projet pour la Région. Je suis quelqu’un de profondément ancré dans le service public. Mais mon profil est semble-t-il plutôt un profil de directeur de Centre Dramatique National. C’est pour cela qu’il a été décidé de transformer le Centre du Poitou-Charentes en Centre Dramatique National. C’est une politique que le Ministère souhaite suivre pour tous les Centres Dramatiques Régionaux afin de simplifier les labels. Cela va engendrer une augmentation de moyens de la part de l’Etat pour atteindre les 50% du financement, la Ville va me favoriser un accès dans le centre de Beaulieu. Cela ne veut pas dire que l’implantation territoriale va disparaître, au contraire, l’augmentation des moyens va permettre de développer le CDN, en travaillant avec un réseau de salles allant des scènes nationales aux scènes municipales, car c’est une Région nourrie d’un fort tissu associatif, avec beaucoup de bénévoles. On insistera sur l’artistique, avec un travail sur les auteurs contemporains et le théâtre européen, ainsi que le travail avec des metteurs en scènes et des compagnies de la Région, mais aussi la formation avec le Conservatoire Régional. Donc je suis riche de la direction d’une maison et je vais enfin pouvoir déposer mes valises en habitant sur place. Et il me semble que la polémique s’apaise et que les gens ont envie de travailler avec moi.
C’est peut-être ce que craignaient les tutelles locales, voir arriver un directeur qui ne s’attache pas à la Région ?
La crainte est légitime, et c’est une question que se posent toutes les tutelles locales. Mais je crois que l’on a beaucoup évoluer. Les directeurs de Centres Dramatiques ont quitté cette idée qu’ils sont parisiens les 9/10ème de leur temps, et de temps en temps sur place. On sait à quel point diriger un Centre Dramatique nécessite de conserver des liens avec des réseaux professionnels. J’ai des liens avec la Suisse, la Belgique, mon pays d’origine, et d’autres pays européens, et c’est important pour apporter des financements. Je m’en rends compte avec un projet que je souhaite monter en 2013, un Roméo et Juliette avec des comédiens français et belges. Juliette sera flamande et Roméo, wallon. Et sera un projet essentiel pour le CDN. Le faire avec la Belgique permet d’arriver avec un financement important. C’est ce que j’avais promis à la Région.
Propos recueillis par Stéphane CAPRON – www.sceneweb.fr
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