Malgré une météo capricieuse qui a chamboulé sa programmation, l’institution parisienne a pu rouvrir ses portes, ce mercredi 19 mai au matin, avec les propositions douces, voluptueuses et sensibles d’Ambra Senatore et d’Henri Tournier.
Tout était prêt, mais tout ne s’est pas exactement passé comme prévu. Pour célébrer sa réouverture, ce mercredi 19 mai, après plus de six mois de fermeture, le Théâtre de la Ville avait mis les petits plats dans les grands. Non contente de proposer, en soirée, dans la grande salle de l’Espace Cardin, Six personnages en quête d’auteur mis en scène par son patron, Emmanuel Demarcy-Mota, l’institution parisienne avait concocté un riche programme qui devait, dès 8h30, mêler et conjuguer les arts, en intérieur comme en extérieur. Las, la météo capricieuse a obligé le théâtre à changer son fusil d’épaule : annulé l’atelier « Danse pour tous » prévu avec Clint Lutes sur la scène Marronnier, remisées les consultations poétiques, musicales et dansées qui devaient se tenir, en face à face, dans les jardins… Seuls le concert d’Henri Tournier et des musiciens de la Troupe de l’Imaginaire, la consultation scientifique de Jean Audouze et la répétition publique commentée d’Ambra Senatore ont pu survivre au déluge matinal et être rapatriés, en urgence, dans l’enceinte de l’Espace Cardin.
Autant d’imprévus qui n’ont pas empêché les membres de l’équipe d’accueil du Théâtre de la Ville d’afficher un large sourire, visiblement heureux de voir plusieurs dizaines de spectateurs reprendre leur place dans les gradins. « C’est la première fois, depuis novembre, que je m’adresse à des personnes avec un micro et c’est avec une émotion certaine que j’observe, ce matin, des visages de spectateurs dans un théâtre, a salué Emmanuel Demarcy-Mota lors d’une prise de parole inaugurale. Ces derniers mois, nous avons fait tout notre possible pour entretenir le lien, grâce aux différentes consultations et aux spectacles diffusés en direct qui nous ont permis de toucher un public bien au-delà des habitués du Théâtre de la Ville, mais cela fait du bien de pouvoir regarder aujourd’hui la présence humaine des humains présents. »
Création participative
A commencer par celle d’Henri Tournier qui avait déjà participé à la veillée de déconfinement du Théâtre de la Ville en mai 2020. En compagnie de sept autres consultants musicaux de la Troupe de l’Imaginaire, le flûtiste a imaginé un concert idéal pour une matinée, empreint à la fois de douceur et de sensibilité. S’y entre-croisaient, pêle-mêle, les chansons anciennes albanaises de Linda Rukaj, les compositions de guitare électrique d’Alexandre Choiselat et Daniel Jea, les chants traditionnels méditerranéens de Dimitra Kontou, accompagnée à la viole de gambe et au violoncelle par Silvia Lenzi, mais aussi la voix et la guitare acoustique de Rafael Brouard et Pacôme Genty. Visiblement émus de faire face à un public, et de recevoir des applaudissements aussi chaleureux que nourris pour la première fois depuis de nombreux mois, tous ont sublimé ce programme musical composé en un temps record.
En parallèle de la consultation scientifique donnée par Jean Audouze dans le hall de l’Espace Cardin, Ambra Senatore a ouvert, en seconde partie de matinée, un atelier de recherche sur le plateau du petit studio. Après avoir interprété un fragment chorégraphique en tenue de ville, façon pour elle de réinvestir cette scène désertée depuis de longues semaines, la performeuse a cherché à transformer les spectateurs en co-auteurs de sa prochaine création, encore en gestation. « J’ai, depuis très longtemps, envie de créer un solo et vous allez m’aider, si vous en avez envie, à l’imaginer », a-t-elle d’emblée prévenu. Reprenant la forme des conversations publiques qu’elle avait lancées en 2019 avec le Centre chorégraphique national de Nantes, elle a demandé aux volontaires de lui fournir des « ingrédients » sur ce qui leur « tenait à coeur » ou sur ce que leur évoquait la thématique du « chez soi » sur laquelle elle souhaite travailler. Alternant style ironique et grande émotion à l’évocation de son passé familial, la chorégraphe s’est nourrie des remarques de chacune et de chacun, mais aussi des musiques choisies par certains participants, pour offrir à tous un moment d’improvisation final tout en volupté. Difficile d’imaginer meilleur format pour renouer, enfin, une relation avec le public.
Vincent Bouquet – www.sceneweb.fr
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