Après une période de gratuité, les institutions imaginent de nouveaux modes de diffusions de leurs créations. L’Opéra national de Paris lance sa propre plateforme. L’English National Ballet possède déjà la sienne.
L’annonce d’Alexander Neef, nouveau directeur de l’Opéra de Paris, n’a pas manqué de faire réagir. L’institution parisienne, ayant connu en 2020 son année la plus noire (avec 145 représentations annulées), va lancer son propre canal de diffusion. Jusqu’ici l’Opéra de Paris s’appuyait sur Arte ou France TV pour mettre en ligne les captations de ses opéras ou ballets. Pendant le premier confinement au printemps plus de 2 millions de spectateurs étaient présents devant les écrans pour des rendez-vous gratuits. Ces propositions ont été saluées par (presque) tous : mais ici ou là certains s’inquiétaient d’une relative dévalorisation. Notamment les artistes du lyrique.
L’événement proposé par l’Opéra de Paris le vendredi 13 novembre dernier était lui d’une autre nature. Payant et sous la houlette du géant Facebook, ce direct (avec replay sur 48h) jouait sur le côté exclusif de la chose : soit un programme de chorégraphes contemporains inédits –pour cause de confinement- du Ballet de l’Opéra de Paris. Presque 5000 acheteurs le soir-même, le double sur la durée. Pour l’Opéra c’est un succès. Pourtant les événements autour du Bolchoî ou de l’Opéra de Paris lui-même dans les salles de cinéma ont souvent fait mieux, mais pour la compagnie, il y a urgence à monétiser son répertoire.
Le MET de New York ne fait pas autre chose avec notamment des récital uniques et prestigieux. La gratuité a un coût, on l’imagine. Les salles, fermées en grande partie, risquent de devoir faire avec des jauges limitées une fois les restrictions levées. Et donc des recettes en baisse (l’Opéra national de Paris a remboursé cette année 258 500 places pour un montant de 25 millions d’euros). Surtout il y a urgence à maintenir un lien avec les fidèles amateurs –et si possible séduire d’autres publics avides de réseaux sociaux et autre streaming. Les opérations payantes sont amenées à se multiplier dans le temps. Le Sadler’s Wells de Londres a ainsi proposé il y a peu la captation du Sacre du printemps de Pina Bausch avec des interprètes venus du continent africain. Le spectacle, co-produit par le Sadler’s ou le Théâtre de la Ville à Paris, a vu sa tournée 2020 compromise.
L’English National Ballet vient de lancer sa plateforme digitale Ballet on Demand. Les tarifs varient en fonction du potentiel de chaque programme. La Giselle d’Akram Kahn ou Le Corsaire sont à £.7, 99, La Sylphide à £6,99 ou Dust du même Kahn à £4,99. Son voisin londonien le Royal Ballet propose jusqu’au 13 décembre de voir Within the Golden Hours du chorégraphe Christopher Wheeldon pour £9,22 (soit 11 euros). La Batsheva diffusait samedi 21 novembre en direct et sans possibilité de replay une création d’Ohad Naharin, YAG the movie. Prix à l’unité : 14$. Enfin L’Opéra de Paris va capter La Bayadère en décembre pour une diffusion payante sur sa propre plateforme en gestation. Mais espère quand même la donner en scène et pour un vrai public. On le voit les initiatives se multiplient et ce qui était la norme il y a peu, la gratuité, risque devenir l’exception en 2021.
Philippe Noisette – www.sceneweb.fr
Laisser un commentaire
Rejoindre la discussion?N’hésitez pas à contribuer !