Dom Juan est, pour moi, avant tout, un insoumis. Son héritage, c’est le devoir de calquer sa conduite et sa pensée aux normes de son temps — ce à quoi il va se refuser obstinément, jusqu’à la mort. Dom Juan est jeune, entier, borné dans sa position qui consiste justement à « dépasser les bornes ». Cela me fait penser à une phrase de Brecht : « On dit d’un fleuve emportant tout qu’il est violent, mais on ne dit jamais rien de la violence des rives qui l’enserrent. » Ainsi, Dom Juan peut paraître « inexcusable » jusqu’à l’arrivée de Dom Louis, son père. C’est une confrontation d’une violence inouïe. Dans cette scène, Dom Juan perd complètement l’usage de la rhétorique.
Quel est l’espace de liberté pour Dom Juan ? Tout semble avoir été fait avant lui. Tout le renvoie à une « perfection » dans laquelle il devrait avoir la chance de s’inscrire, et son chemin autant que ses habits devraient être la gageure d’une continuité. Mais il se refuse à cet héritage sans espace, et prend le parti du présent, du mouvement. Au blanc, il oppose le noir, au noir, le blanc. Il cultive un besoin de confrontation maladif avec tout ce qui semble « établi ». Il est jeune, et veut trouver « sa » place, et ne pas seulement être un portrait figé dans une époque qu’il juge hypocrite et statufiée dans des comportements et des postures stériles. Molière, quand il écrit Dom Juan, sort de Tartuffe, pièce interdite. Il sait ce que sont les relations d’influence et de pouvoir. On le sent habité par la colère, le dégoût du « bien pensant » et de la censure. Ce n’est pas un hasard si les premiers mots de la pièce font l’éloge du tabac : son usage avait été condamné par Louis XIII et les dévots, et en 1642 le pape l’avait interdit (la fumée sortant du nez et de la bouche le faisant s’apparenter à la figure du diable). Molière utilise Sganarelle et l’écran de la « comédie » pour se jouer de la sottise des apparences et de l’hypocrisie. Dans la scène où Sganarelle est déguisé en médecin, il montre que c’est « l’habit qui fait le moine » ; il s’en amuse autant qu’il le déplore. Extrait de la note d’intention de Julie Brochen d’après dossier de presse.
Dom Juan
De Molière
Mise en scène Julie Brochen
Lumières Olivier Oudiou • Scénographie Julie Brochen et Marc Puttaert • Costumes Thibault Welchlin • Maquillages, coiffures Catherine Nicolas • Direction musicale et vocale Françoise Rondeleux, Loïc Herr • Piano Nikola Takov • Assistanat à la mise en scène Amélie Énon
Avec
Muriel Inès Amat* Elvire, femme de Dom Juan
Christophe Bouisse Dom Alonse, frère d’Elvire
Fred Cacheux* Dom Carlos, frère d’Elvire
Jeanne Cohendy Charlotte, paysanne
Hugues de la Salle Monsieur Dimanche, marchand
Marie Desgranges* Mathurine, paysanne
David Martins* La Ramée ; Gros Lucas ; Franscisque, pauvre
Antoine Hamel Pierrot, paysan
Ivan Hérisson* Sganarelle, valet de Dom Juan
Mexianu Medenou Dom Juan, fils de Dom Louis
Cécile Péricone* Gusman ; Une suivante d’Elvire ; La Statue du Commandeur
André Pomarat Dom Louis, père de Dom Juan
et Amélie Enon (Suivante), Nikola Takov (piano)
Production
Théâtre National de Strasbourg
Salle Koltès
Du mercredi 3 au samedi 13 octobre 2012
Du mardi au samedi à 20h, dimanche 7 à 16h
Relâche lundi 8
Bonjour, et merci pour ce moment exceptionnel! Tout était bien: les acteurs, la lumière, les costumes, et la musique! Je serais très heureuse de connaître le nom du compositeur et de la partition qu’interprétait Loic Herr, pourriez-vous me renseigner? Cordialement, Dominique Freydier
Requiem de Mozart en ré mineur et des extraits de musique religieuse de Monteverdi …