A la suite de la publication du rapport de l’observatoire sur l’égalité entre femmes et hommes dans la culture et la communication, la section HF de Rhône Alpe a publié la semaine dernière un tableau regroupant certains chiffres éloquents sur la parité dans le spectacle vivant. L’occasion de faire le point sur la situation des femmes dans le spectacle vivant avec le mouvement HF.
C’est l’histoire d’un tableau qui s’est vite répandu sur les réseaux sociaux. « Nous en sommes à plus de 100 000 vues et 1000 partages » confirme Faustine Lebras du mouvement HF Normandie deux jours après l’avoir mis en ligne à l’occasion de la journée des droits de la femme. « C’est énorme pour nous. Le fait de rassembler des chiffres d’horizons divers a certainement assuré sa réussite. Ce tableau vient de la section HF de Rhône Alpes qui l’a construit à partir de chiffres officiels venant du Haut Conseil à l’Egalité notamment ».
C’est effectivement à cette source que nous retrouvons l’origine de ce 11% de « moyenne nationale des femmes programmées dans le spectacle vivant » qui a attiré notre attention, en contradiction qu’il était avec les résultats du tout chaud rapport de l’observatoire sur l’égalité entre femmes et hommes dans la culture et la communication. La part des femmes dans la programmation des équipements culturels de spectacle vivant labellisés par le ministère de la Culture y est là évaluée à 31%.
Tout dépend évidemment des périmètres considérés et des formes de calcul retenues. « Par exemple, nous ne voulons pas prendre en compte les co-directions mixtes dans nos calculs de direction artistique féminine » explique Faustine Lebras. La différence – d’importance – vient cependant d’ailleurs. Le chiffre de 11% affiché par le viral visuel provient du rapport 2018 du HCE et désigne en réalité le pourcentage d’œuvres écrites par des femmes dans les programmations des 102 théâtres, orchestres et opéras subventionnés.
La danse en tête et la musique à la traîne
La situation dans le spectacle vivant n’est donc pas si catastrophique que le laisse penser ce chiffre et celui de 31% donne une photographie plus exacte et plus complète de la situation des femmes dans le spectacle vivant. L’étude de l’observatoire montre même une sensible amélioration sur la décennie passée. C’est bien le moins qu’on pouvait espérer.
Si l’on détaille les données, on s’aperçoit que, dans le paysage composite du spectacle vivant, l’Opéra reste bon dernier avec une part des femmes dans la programmation de seulement 11%, un chiffre remarquablement faible, qui est cependant en augmentation par rapport à la saison 2008-2009 (7%). La danse , elle, est en pointe avec une part féminine de 44% dans la programmation des CDCN. Entre les deux, CDN, scènes nationales et autres pôles nationaux du cirque s’établissent tous entre 31 et 33% de femmes dans la programmation.
Côté programmation donc, si l’égalité n’est pas encore effective, on ne peut passer sous silence les progrès réalisés depuis quelques années. Du côté des directions de lieux, le constat va dans le même sens mais la progression paraît plus lente. Là, les bonnets d’ânes sont les SMAC (Scènes de Musique Actuelle) qui ne sont dirigées qu’à hauteur de 13% par des femmes ! Et en tête, encore une fois les CDC dirigés à 67% par des femmes, mais aussi, de manière plus surprenante quand on détaille la situation des femmes dans ces secteurs, les orchestres à 65% et les opéras (5 opéras nationaux) qui sont eux à 40% dirigés par des femmes. Du côté du théâtre, aucun Théâtre National ne compte de femme à sa tête (peut-être est-ce pour cela que la catégorie n’apparaît pas dans le tableau de l’observatoire ?), et les pourcentages de femmes dirigeant des CDN et CDR ( 27%) et des scènes nationales (30%) ne progressent que lentement. Cet état des lieux dressé par l’observatoire ne recouvre que la part de ce qu’on a coutume d’appeler le théâtre public. C’est à dire environ la moitié du nombre de places de théâtre vendues chaque année. Côté théâtre privé, il n’existe cependant pas à notre connaissance de données disponibles sur le sujet. C’est regrettable. Un regard sur les Molières donne toutefois quelques indications, puisque les récompenses y sont partagées entre théâtre public et privé. Et l’élargissement du spectre ainsi occasionné ne paraît pas particulièrement favorable aux femmes, c’est le moins que l’on puisse dire. En effet, entre 2008 et 2019, on retrouve seulement 15% de femmes parmi les metteurs en scènes nominés pour le Molière de cette catégorie, et une seule femme primée en dix ans. Ce qui vaut bien la seule palme du festival de Cannes rappelée par HF Normandie dans son visuel. Pas mieux du côté des auteurs avec 22% de femmes nominées mais aucune récompense en dix ans !
Eric Demey – www.sceneweb.fr
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